I Histoire de la frontière
L’Avesnois partage avec la Belgique une frontière de plus de 100 Kilomètres s’étendant d’ouest en est de la commune de Eth jusqu’à celle d’Anor.
Citons ici les communes limitrophes : Eth, Bry, Wargnies-le-Petit, La Flamengrie, Bettrechies, Gussignies, Houdain-lez-Bavay, Hon-Hergies, Taisnières-sur-Hon, La Longueville, Gognies-Chaussée, Bettignies, Villers-Sire-Nicole, Vieux-Reng, Marpent, Jeumont, Colleret, Cousolre, Bousignies-sur-Roc, Cousolre, Hestrud, Beaurieux, Clairfayts, Eppe-Sauvage, Moustier-en-Fagne, Baives, Wallers-en-Fagne, Ohain et Anor.
Avant 1659 la limite septentrionale délimitant les Pays Bas espagnols et le royaume de France était située à 50 kilomètres au sud de notre actuelle frontière, passant alors par une ligne Bohain le Nouvion en Thiérache Hirson
Les conquêtes de Louis XIV sur les Pays-Bas espagnols en 1659 (Traité des Pyrénées) eurent pour conséquence le rattachement de Le Quesnoy de Landrecies et d’Avesnes sur Helpe à la France.
Le Traité de Nimègue (1678) marqua de nouvelles victoires françaises avec la prise de Maubeuge et de Bavai. Surtout il entérina chez nous un tracé frontalier immuable à travers les siècles suivants à l’exception de la frontière au niveau de la Flamengrie (voir la page consacrée à La Flamengrie et ses bornes frontières) et hormis de très légères modifications lors du Traité de Courtrai de 1820 comme à Beaurieux ou Anor par exemple. Il en fut tout autrement concernant les autres portions de la frontière franco belge qui firent l’objet de laborieuses négociations avant que des conventions entre souverains alliés et non plus un traité entre puissances belligérantes réglèrent définitivement la question de la frontière (conventions de limites franco-autrichiennes de 1769 et 1779 et franco-liégeoises de 1772) et débouchèrent sur un tracé rigoureux, très proche du tracé actuel. La configuration de ces lignes de démarcation s’établit au XVIII e siècle d’avantage sur des intérêts économiques que militaires. Les gouvernements français et espagnol négocièrent en effet davantage le tracé frontalier « en fonction d’une liberté préservée du commerce et des communications, d’une homogénéité conservée des unités économiques et d’une efficacité renforcée de la répression de la fraude ». L’Espagne et la France possédait de multiples bureaux de douane présentant un précieux intérêt financier.
II Histoire de la douane
Jean-Baptiste Colbert, contrôleur Général des Finances sous Louis XIV (1663 1683), est considéré comme le père de la douane moderne. Inspiré par la doctrine mercantiliste, il croit que la richesse d’un pays est à la mesure de ses réserves en numéraire. Il convient donc d’exporter un maximum de produits à forte valeur ajoutée et de limiter les importations. Les droits de douane sont désormais perçus comme un levier des politiques économiques. Ainsi, un tarif douanier national va progressivement se mettre en place entre 1664 et 1667 mettant fin aux droits de douane intérieurs. Tous les droits de Traite sont affermés par bail de 6 ans à une compagnie de financiers connue sous l’appellation de Ferme Générale ayant son siège à Paris. La Ferme représente une importante source de revenus représentant près de 50 % des recettes publiques. Ses services comptent jusqu’à 42 directions en province et près de 25 000 agents appartenant à deux branches d’activité :
- celle des « bureaux » : qui vérifie, liquide et perçoit les droits et taxes ;
- celle des « brigades » : qui prévient, recherche et réprime la contrebande.
Les employés de la Ferme ne sont pas des fonctionnaires royaux, mais ils agissent « au nom du Roi ». Les fermiers généraux amassent d’immenses fortunes et sont très impopulaires.
Avec la Révolution naît l’administration des douanes moderne et la fin de la Ferme Générale tant contestée. Ainsi, la Ferme Générale est nationalisée pour donner naissance le 23 avril 1791 à un nouveau service, la Régie nationale des Douanes.
Comme sous la Ferme générale, la douane du XIXème siècle est solidement cloisonnée en deux services :
- les bureaux : service sédentaire chargé de la taxation
- les brigades : service actif chargé de la surveillance
Les agents des brigades représentent la part la plus importante des agents. Ils se distinguent par le port de l’uniforme et des armes et sont organisés militairement et casernés et ce jusqu’en 1945 avant de devenir des fonctionnaires civils. Leur présence se concrétise notamment par l’instauration aux frontières d’aubettes ou postes de douanes Ces guérites disparaitront en 1995 lors de la suppression des frontières au sein de l’Union européenne
III Les Postes de Douane à travers les cartes postales
Y seront ajoutés dans la mesure du possible les Bureaux de Douane des communes concernées.
Eth
Bry
Aux Archives Départementales du Nord le résultat d’un dépouillement des documents relatifs au personnel des douanes conservés en série P (cotes P 57 / 1-40) couvrant la période 1807-1911 permet de dire qu’il y eut en 1841 un bureau de douane à Bry composé d’un brigadier, d’un sous brigadier et de six préposés (P 57/5-2). Il y eut également un receveur en la personne de Toussaint Deltour (P 57/21). Celui-ci était né en 1829 à Regniowez dans les Ardennes et s’était marié en 1858 à Bruille lez St Amand (59), avec Marie Zoe CHARLIER. Sa fonction de douanier à Bry est ultérieure à 186o.
La Flamengrie
Les douaniers étaient nombreux à La Flamengrie avec la présence de deux postes de douane français. Les contrôles y étaient donc multiples, allant jusqu’à provoquer l’exacerbation des cultivateurs dont l’exploitation était à cheval sur la frontière et dont l’activité nécessitait régulièrement le passage des bêtes ou des récoltes à la frontière. Cependant l’inflexibilité de la douane ne suffisait pas à contrecarrer la contrebande fortement encouragée par l’attrait de prix plus bas en Belgique qu’en France. Les contrebandiers venaient surtout de villages plus éloignés car ils savaient qu’ici la frontière était sinueuse et donc les points de passage nombreux. Le nombre d’estaminets et de cabarets qui servaient de point de contact passa alors de 2 en 1876 à une quinzaine entre 1886 et 1914. Il n’était pas rare que l’arrivée inopinée des douaniers dans un estaminet obligeait à cacher dans une autre pièce des contrebandiers qui s’y trouvaient … et à les garder jusqu’à 8 jours ! Certains contrebandiers utilisaient des caches où les marchandises étaient entreposées, lesquelles étaient récupérées par des porteurs capables de faire la course avec les douaniers, malgré leur ballot de 20 ou 30 Kg sur le dos. D’autres contrebandiers dressaient spécialement des chiens à passer la frontière, seuls, avec un corset bourré de tabac. C’était alors aux chiens de déjouer les pièges des douaniers et d’affronter leurs chiens.
Bettrechies
Un brigadier Aubert, un sous brigadier Noel et des préposés étaient en fonction à Bettrechies (ADN P 57/5-2). Il existait également une caserne des douaniers comme en témoigne cette carte postale.
Gussignies
Passe-tout-Outre est un lieu-dit du village belge d’Autreppe (commune de Honnelles). Étant au carrefour de l’ancienne chaussée Brunehaut reliant Bavay à Tournai et la route frontalière de Fayt-le-Franc à Roisin, le lieu-dit situé exactement à la frontière française doit son nom et sa réputation au fait que son café était la halte habituelle de contrebandiers en tout genre, attendant la nuit pour passer leur marchandise en France.
Houdain lez Bavay
L’ancien poste de douane d’Houdain lez Bavay a conservé ses barreaux. La suppression de la douane a conduit à redresser la route.
Coté belge, le poste de douane implanté au lieu dit « Rat d’Eau » animait la vie quotidienne. Il est aujourd’hui transformé en friterie.
Hon Hergies
La cote P 57 / 5 – 2 nous apprend également que Hon Hergies disposait au début du XIX e siècle d’un bureau de douane sédentaire. Un brigadier Gigon, un sous brigadier Fournier et huit préposés étaient chargés de la taxation. (ADN Sous Série P 57 et suppléments – Personnel des douanes)
Taisnières sur Hon
Ce poste de douane disposait vers 1850 d’un receveur, un brigadier, un sous brigadier, un visiteur et des préposés
Au carrefour de la chaussée Brunehaut et de la rue de Mons, à Taisnières-sur-Hon, l’ancien poste de douane a définitivement disparu le mercredi 31 juillet 2013.
A la place, un carrefour où des élus de la commune et des habitants se sont mobilisés pour planter diverses espèces végétales en 2014. D 932 X D 105 X VC Brunehaut
Gognies-Chaussée
Le poste de douane se tenait au lieu-dit le « Bois Bourdon », à l’actuelle intersection de la route de Mons Maubeuge et de la chaussée Brunehaut (rue du Roi Albert Ier).
Voici ci dessous trois cartes postales de la même frontière mais côté belge :
Bettignies
Vieux-Reng
La frontière à Vieux Reng se situait au hameau de Lameries sur l’actuelle D 28A en direction de Grand Reng Erquelinnes.
Jeumont
D’autres cartes postales sur le site de la Médiathèque de Jeumont
Cousolre
2 frontières l’une vers Bersillies l’Abbaye et l’autre vers Beaumont.
Hestrud
Beaurieux
Le même emplacement rue de la Marzelle direction Beaumont Sivry en 2009 et en 2019
L’ancienne douane, utilisée de 1871 jusque dans les années 70, au lieu-dit « La Motte » a été restaurée et inaugurée en juin 2022
Lors de cette inauguration le maire M Emmanuel Dursent confia que : « cette bâtisse fera l’objet d’un circuit par le musée de la douane d’Hestrud, et pourquoi pas devenir une chambre d’hôte insolite à l’avenir ? ». Photo et Source La Voix du Nord
Clairfayts
Personnel des douanes à Clairfayts relevé dans la base de données nominative dressée en 2014 par Jean-Pierre Minel sous la direction de Mireille Jean, directrice des Archives départementales : Le receveur Blancho, le Brigadier Adam, le Sous Brigadier Denamur, les préposés Bar, Charon, Flament, Langlois, Legros, Petit, Rousseau puis par la suite le brigadier Pech.
Ce personnel évolue en tant que douanier dans les années 1830 1870 car par exemple Pierre Rousseau est né vers 1798 à Feignies, se marie dans la commune en 1820, est préposé des douanes en 1834 à Felleries et décède en 1885 à Clairfayts. En 1820 son beau père François Lhotellerie était également préposé des douanes.
Eppe-Sauvage
Moustier-en-Fagne
Un bureau de douanes fixe à Moustier avec un Brigadier Bertholet, un Sous Brigadier Biche et sept préposés (ADN P 57 / 5 – 2). Nicolas Biche est douanier à Sémeries en 1841 âgé alors de 28 ans.
Wallers-en-Fagne
Il semble qu’il y eut à Wallers un assez important poste de douane chargé de la taxation à la vue du personnel présent selon toujours le recensement aux Archives Départementales : 1 Brigadier, 1 Sous Brigadier, 1 Receveur, 1 Médecin des Douanes, 1 Commis et 9 Préposés.
Ohain
Anor