Le village de Dompierre-sur-Helpe s’étage le long d’un affleurement rocheux qui domine l’Helpe-Majeure au nord.
On ne peut visiter ce ravissant village sans connaitre Saint Etton, qui appartient à l’histoire et au folklore de la région. Tous les ans, à l’Ascension, une grande fête se déroule à Dompierre où les fermiers des environs viennent avec des rameaux dont l’écorce est découpée en spirales, toucher le gisant du saint. De retour à la ferme, ils en touchent tous les animaux de leur bétail afin qu’ils soient préservés des maladies pendant toute l’année.
Histoire et légende de Saint Etton :
Au VII e siècle, plusieurs religieux irlandais, sollicités par Madelgaire, seigneur de la cour de Dagobert,et par Waudru, sa femme, abandonnèrent leur pays, se rendirent à Rome avec leur protecteur, et vinrent s’installer en Artois puis en Thiérache, prêcher le christianisme.
L’un d’eux, Etton, vint s’établir à Fuchaux, au bord de la chaussée romaine, en un lieu appelé Villers-en-Thiérache, dont Jovin était le seigneur.
Il se mit à défricher le sol avec quelques disciples, quand Jovin, furieux de se voir dépossédé, accourut et osa porter la main sur Etton. La main demeura attachée au manteau du saint et se dessécha aussitôt. Mais Etton, voulant donner un gage de toute puissance de la prière, délivra par ses oraisons la main sacrilège, et Jovin en recouvra l’usage.
En reconnaissance de ce miracle, Jovin mit les religieux en possession des biens qu’il avait.
Le village de Dompierre-sur-Helpe, d’abord implanté au lieu-dit Fuchau, aurait donc été fondé par un moine irlandais, saint Etton, venu prêcher le christianisme en Thiérache. Il dédia l’église à saint Pierre, en souvenir de son voyage à Rome, d’où le nom du village.
Un jour, saint Etton trouva endormi dans une prairie un bouvier, muet de naissance, qui se trouvait au milieu de son troupeau. Le saint le toucha son bâton, et le paysan se mit àparler. Telle est l’origine des baguettes de saint Etton. Celui-ci mourut a Fuchaux en 654.
Le culte de Saint Etton :
En 1162, Guillaume de Dompierre possédait la terre de Fuchau. Renonçant au métier des armes, il prit l’habit monastique à Liessies, et donna à l’abbaye de Liessies l’église conventuelle de Fuchau avec l’annexe de Dompierre et différents biens qui devaient dépendre du monastère de Fuchau. Il donna également le corps de saint Etton qui se trouvait dans l’église de Dompierre à charge pour l’abbaye de créer un prieuré de moines pour son service. Le prieuré fut édifié en effet dans un vallon charmant, et l’on vit en 1604 les habitants de Dompierre y adosser leur église.
A la suite des guerres de religion, les reliques de saint Etton furent mises en sûreté à Mons. Mais la paix revenue, les moines de Liessies les ramenèrent dans leur monastère. D’où des querelles qui durèrent deux siècles entre les habitants de Dompierre et l’abbaye. En juillet 1789, les habitants s’armèrent et se rendirent à Liessies pour réclamer le corps de leur saint patron, qu’ils ramenèrent triomphalement à Dompierre.
La chapelle du prieuré, construite au XIIIe siècle, fut donc été réunie à l’église, édifiée ou remaniée au XVIe siècle. Le prieuré fut supprimé en 1790. Il fut par la suite transformé en brasserie tenue dans les années 1860 par M Alfred Neuilly puis par son gendre Louis Borgniet. Dans les années 1950 il abrita des petites colonies de vacances avec pour directrice Mme Buillot. Il était alors dénommé « le Joyeu Castel ». Une crémerie en devint propriétaire avant qu’elle se transforma en laiterie de l’abbaye qui abattit cette demeure historique, les travaux de rénovation étant trop importants.
Le clocher présente des éléments défensifs (archères) qui font pencher pour une datation du XIIIe siècle.
La tour porche s’avance en façade et sa base est constituée de quatre arcades. Elle est fortifiée et possède des archères aux différents étages que l’on peut vraisemblablement dater du XIII° siècle. L’existence d’une double rangée de corbeaux en pierre montre que la tour a été surélevée. Le dernier étage est à l’origine pourvu d’ouvertures en plein cintre, qui renferment des baies géminées séparées par une colonnette portant un chapiteau à palmettes, encore visible sur la face nord de la tour.
L’église, construite en grès est nous l’avons dit de 1604. Elle est munie d’un fort clocher-donjon carré comportant le porche et trois étages de salles de refuge et de défense. A sa nef était accolée une chapelle seigneuriale.
En 1767 on fit les deux nefs latérales et en 1791 on démolit le mur de séparation entre cette église et la chapelle des moines, la chapelle devenant alors le chœur à l’église.
L’intérieur renferme :
- les boiseries du choeur datées de 1739 qui proviennent du Couvent des Recollets d’Avesnes. Elles sont ornées de panneaux sculptés représentant des scènes de la vie du Christ mais aussi des scènes de la vie de saint Francois car les Récollets suivaient la règle franciscaine (MH). Ces tableaux sont l’oeuvre d’un moine d’Avesnes.
- Le tombeau de saint Etton, avec gisant en bois du XVIII e siècle. En frottant leurs baguettes, les paysans ont usé le nez du saint, qui a du être remplacé à plusieurs reprises. On remarquera au pied du tombeau une colonnette orné d’un chapiteau a volute et surmontée d’un petit coffre qui forme tronc (XVIIe ou XVIIIe – MH).
- Chasse en bois sculpté et doré (1556) représentant sus les faces principales les deux miracles célèbres de saint Etton.
- Buste-reliquaire du saint (XVIIIe).
- Bras-reliquaire en argent et cuivre doré (XVe). (Dans le trésor de l’église MH)
- Fonts baptismaux (1675), au fond du collatéral de droite. La Chapelle des fonts possède une belle pierre tombale de la famine de Préseau.
- Des plaques funéraires du XVIIIe, et dont deux présentent des inscriptions fort curieuses : dans le mur du collatéral droit, monument d’Antoine Bucquoy enlevé » à la fleur d’âge de 30 ans » et de Marguerite Erraulx, « sa tourterelle » morte à l’âge de 66 ans (MH). Photo non mise en ligne; dans le mur du collatéral gauche, autre inscription funéraire : « Parmi les cendres de Mathieu Erraulx, décédé en 1776, reposent celles d Anne Loison, son épouse, qui finit âgée de 63 ans, après 48 ans de lit entier… », avec cette conclusion sereine : « Les services du dit Erraulx n’attendent que ce dernier mot : Requiescat in pace… ».Voir la photo ci-dessus.
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Cet imposant monument est composé d’un mur de pierre bleue délimité par quatre pilastres, celles placées aux extrémités portent les dates du début et de la fin du conflit de 1914-1918 , entre les deux, on peut lire les noms des 9 victimes militaires et des 3 civils. Adossée au milieu de ce mur, Marianne, en haut relief, brandit de la main droite un drapeau, telle « la Liberté guidant le peuple. » de Delacroix, et de la main gauche elle tient une épée. A ses pieds, deux soldats, l’un jeune, l’autre plus âgé , moustachu, représentent les différentes générations qui ont combattu durant ce conflit.
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Au lieu-dit Fuchau se trouve également un moulin sur la chaussée Brunehaut, menant de Reims à Bavay. Avant 1329, il appartenait a la Maladrerie d’Avesnes. A la suite de la cession de la majeure partie du hameau de Fuchau à Saint-Hilaire-sur-Helpe en 1595, le moulin a été reconstruit en 1598 pour le prince de Croÿ. Sa situation stratégique dans la trouve de l’Helpe lui vaut de multiples destructions. Afin de prévenir d’éventuelles attaques, une tour de guet avec quelques meurtrières fut bâtie probablement au XVIe. En 1786, il est de nouveau transformé et restauré. En 1823, il appartient a monsieur Marchand. Vers 1881, il est toujours en fonction. Au début du XXe siècle, Felicien Hedon prend possession du moulin; l’activite cessera dans les années 1980 après le décès du petit-fils, Francis Hedon. La roue du moulin, d’abord à aubes, sera remplacée par une turbine. En dernier lieu, un moteur au fioul actionnait toute la machinerie. Sur un bâtiment récent, on peut encore lire le nom de l’entreprise : Moulin de Fuchaux. La ventellerie comprend sept vannes dont une molleresse. Le déversoir de trop-plein se trouve sur la rive gauche. Cet ensemble vient d’être rénové dans le cadre du « Contrat de rivieres des deux Helpes ». Dans le pignon du moulin, il est possible d’observer l’endroit ou, jadis, passait l’axe de la roue. La porte d’entrée possède un arc en accolade du XVIe siècle. Dans la cour un ruisseau, venant de l’oratoire Saint Etton va se jeter dans l’Helpe-Majeure.
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Les activités marbrières existaient sur la commune : les statistiques du préfet Dieudonné publiées en 1810 mentionnent deux carrières de pierre de taille, deux de moellons et une de marbre. Un gisement de dolomie est exploité au lieu-dit La Cornette jusqu’en 1970. Les vestiges d’une très importante laiterie sont visibles derrière l’église paroissiale. En effet en 1906 fut créée une laiterie qui en 1937 portait le nom de « Beurrerie Coopérative de l’Abbaye. En 1981 l’Abbaye de Dompierre décida d’arrêter la fabrication des aliments pour les veaux, d’arrêter la fromagerie, l’atelier beurrerie… Elle ferma en 1992.
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La première mention d’un seigneur d’Hugemont date de 1283.
Le château d’Hugemont a été sans doute édifié peu après 1674 pour Nicolas de Préseau, seigneur d’ Ecuélin, récemment anobli, qui cumulait les fonctions de greffier du magistrat, contrôleur des Fortifications et prévôt de la terre d’Avesnes . Le château échappa à la tourmente révolutionnaire ; il fut restauré avant les années 1880. Le château, de plan rectangulaire, est cantonné de quatre pavillons légèrement plus élevés que le corps principal. Une ferme comportant des éléments de la fin du XVIe et du XVIIe siècles est intégrée à l’ensemble. L’ensemble est en briques et pierre bleue du pays.
La seigneurie de Dompierre appartenait, avant la révolution, à la maison d’Orléans.Par lettres du 13 juillet 1736, le titre et les droits d’officiers de haute, moyenne et basse justice dans la seigneurie de Dompierre, furent conférés à M. François-Joseph de Préseau d’Hugemont, prévôt général de la maréchaussée. En 1751, les mêmes droits furent accordés par le duc d’Orléans à M. Jacques-Marguerite de Préseau d’Hugemont, fils du précédent, pour en jouir à la succession de son père.
Jacques Marguerite de Préseau était grand amateur de chevaux, il avait créé à Hugemont des haras de forte renommée. sa popularité préserva la château de toute dévastation. Le château passa ensuite aux Colnet, puis au marquis de La Grève, baron de la Sainte Ampoule. Il est de nos jours la propriété du comte de Chambure. le domaine est magnifique avec son parc, ses étangs et ses terrasses composées de pelouses, de jardinières et vasques qui leur confèrent un style anglais.
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Soulignons pour conclure , une association « Les Amis du Patrimoine de Dompierre-sur-Helpe » créée en 1992 qui a pour excellente initiative la sauvegarde du patrimoine du village. Consulter ici son site. Bravo à son Président et ses adhérents pour le travail accompli.
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