La Collégiale d’Avesnes-sur-Helpe (Chroniques et Mélanges)

La terre d’Avesnes formait une des plus anciennes seigneuries du Hainaut. On en fait remonter l’origine au commencement du onzième siècle lorsque vers 1020 le comte Rainier V voulant s’attacher Wédric-le-Sor, paladin agité et redoutable, lui donna cette terre pour être tenue en fief de son comté de Hainaut. Son fils Wédric-le-Barbu vint s’installer à Grand-Fayt, où il construisit un château. Il décida ensuite vers 1066, de faire construire un autre château à Avesnes-sur-Helpe. Une agglomération unique se forma, entourée d’un mur d’enceinte qui réunissait deux tours. Sur la place du marché fut fondée l’église Saint Nicolas qui au fil des siècles évolua pour devenir l’un des plus beaux édifices gothiques du diocèse de Cambrai. Retraçons ici l’histoire de cette église qui est étroitement liée à celle de la ville d’Avesnes-sur-Helpe.

Église d’Avesnes-sur-Helpe
Une église édifiée dès le XIe siècle

En ces temps, Avesnes n’était probablement qu’une petite bourgade composée de quelques chaumières groupées autour d’une chapelle rustique, sur la cime d’un roc environné de bois et de marais (Isidore Lebeau, Précis de l’histoire d’Avesnes).

Thierri (ca 1060 + 1106), petit fils de Wédric, entreprit, à portée d’une grosse tour qu’il avait élevée et du château qu’il venait d’agrandir, de bâtir une belle et vaste église « dressée de dortoir et de chapitre ». Il avait l’intention de la doter richement et d’en faire la sépulture de sa famille. Il changea cependant d’idée, pressé par les instantes prières de sa femme Ade qui installa vers 1095 dans un domaine qui lui était propre à Liessies une abbaye bénédictine après avoir transféré peu de temps avant, un chapitre de chanoines provenant d’Avesnes.

Cela n’empêcha pourtant pas l’église d’Avesnes de devenir le siège d’un doyenné ou décanat qui en 1186 comprenait 53 cures ou paroisses (J de Guyse, Annales, livre XVIII).

L'évolution de la paroisse aux XIIIè et XIVè siècles

Pendant une longue suite d’années, la cure d’Avesnes recueillit, en aumônes particulières, des dons, rentes, terres et autres propriétés, sans avoir obtenu, ni même sollicité à cet égard, l’autorisation du seigneur féodal, et sans d’ailleurs lui avoir payé aucun droit.

En mai 1335, le comte Gui Ier de Châtillon (1289-1342), entré en possession en 1303 des terres d’Avesnes, de Guise, etc, agissant par générosité, et pour éviter que la cure ne fusse désormais inquiétée dans la possession de ces biens, lui accorda spontanément, des lettres d’amortissement pour tout ce qu’elle avait acquis de la sorte pendant les soixante années qui avaient précédé le jour de la Trinité (7 juin) 1327, se réservant néanmoins « la justice, la seigneurie, la souveraineté et la garde en toutes les dites choses, ainsi que sur les rentes dont les héritages pouvoient estre chargés envers luy ou autruy » (Inventaire des archives de la pairie d’Avesnes).

L’église et le tombeau du comte Olivier de Châtillon et de Jeanne de Lalaing (1435)

Ce comte de Penthièvre, vicomte de Limoges, seigneur d’Avesnes entra en possession de la terre d’Avesnes en 1404 mais n’arriva à Avesnes que dans le courant de l’année 1422.

Il épousa en 1428 Jeanne de Lalaing, fille ainée de Simon IV, baron de Quiévrain (Brassart Félix, Histoire et généalogie des comtes de Lalaing, Douai, A. d’Aubers, 1854, p. 7).

Olivier fut ainsi lié à l’importante famille des Croy : Marie, sœur de Jeanne, était l’épouse de Jean de Croy, comte de Chimay, grand bailli de Hainaut. Il reçut de Philippe de Bourgogne, par l’intermédiaire de son procureur Jean de Croy, l’hommage pour la seigneurie d’Etrœungt-la-Chaussée. Il mourut en 1433 en son château d’Avesnes et fut enterré dans l’église paroissiale de cette ville.

Sa veuve en 1457 projeta  d’affecter, en fondations et aumônes, « pour le service de Dieu et le salut de son âme » des biens, déjà acquis ou à acquérir, jusqu’à concurrence de trois cent livres monnaie de Hainaut (livre de la mairie d’Avesnes, folios 318 et suivants). Elle dota cette fondation d’une vaste ferme située à St Saulve, près de Valenciennes.

Cette fondation eut pour principe une disposition dans laquelle il était prévue que si le produit de la dotation « par succession de temps, valloit et montoit plus, par an que les charges religieuses conditionnées et les dépenses de réparation et d’entretien de l’église, l’excédant – après les trente premières années, réservées pour certaines économies spécifiées, seroit chacun an, donné et distribué par le conseil et science des mayeurs et jurés, les cinq nuits N D , aux pauvres chartiers et indigents de la ville ».

Ce que la fondatrice avait éventuellement prévu se réalisa bientôt et dans des proportions au-delà de toute espérance. Les produits s’accrurent tellement qu’une large part fut affecté au soulagement des malheureux. Jeanne de Lalaing décéda en 1465, désirant être ensevelie auprès de son mari.

Elle avait fait construire au décès de celui-ci un tombeau qui avait été élevé « dessous une arcuille (voûte) à jour, pratiquée dans toute l’épaisseur du mur qui sépare du chœur la chapelle de la Vierge (M Maloteau de Guerne, notice ms Bibliothèque de Douai). Au midi, l’ouverture était garnie d’un treillis en fer à larges mailles, remplacé par la suite d’un treillis en bois. De l’autre côté, elle était close par une boiserie dans laquelle se trouvait, à une certaine hauteur, une lucarne masquée par un tableau mobile reproduisant les armes d’Olivier et qu’on mettait au pied du sarcophage quant on chantait l’obit dit de Penthièvre, toujours desservi dans la dite chapelle. Le tombeau était en marbre noir, taillé en forme de dé, décoré d’ornements en marbre blanc, et sur lequel étaient couchées les statues du comte et de la comtesse de Penthièvre, ayant à leurs côtés celles de leurs enfants, tous morts jeunes. Deux épitaphes gravées sur la bordure de la table de marbre du monument étaient accompagnées d’écussons aux armes des défunts surmontés d’une couronne comtale.

Le tombeau fut mis dans le chœur en 1769 comme en témoigne le folio 363 du Registre de la Collégiale d’Avesnes n°6 Bis (ADN Série H n°21479) :

R C f° 363. 30 Novembre 1769

Pierre sépulchrale d’Olivier de Bretagne

« A l’assemblée extraordinaire du 30 novembre 1769 tenue dans la sacristie de notre chœur, nous, prévost, doyen et chanoines, avons bien voulu consentir pour le bien et l’ornement de notre susdit chœur et cela à la requête et aux prières tant de Mr Fabry, agent du Price, et de Mrs du Magistrat de cette ville
que de celles de leurs confrères de N. D de 7 Douleurs, que la pierre sépulchrale de Messire Olivier de Bretagne, comte de Penthièvre, seigneur d’Avesnes, qui était cy-devant placée près de la voûte pratiquée dans le mur qui sépare le chœur de la dite chapelle, serait mise en dedans du chœur de niveau avec le mur d’ycelui, lesdits sieurs du Magistrat s’étant obligés par l’acte cydessous de faire placer une armoire, de la mettre en couleur, à faire dorer la peinture et les moulures, laquelle armoire se trouve dans le mur de séparation dudit chœur d’avec la chapelle de St-Nicolas et les confrères de la Chapelle de Notre-Dame s’obligent d’autre part pour la conformité d’environner ce monument au dedans du chœur avec la boiserie qui servait auparavant au dedans de ladite chapelle et de la faire orner et dorer conformément à l’armoire susdite ».

Le tombeau fut saccagé à la Révolution.

1461 : un événement aussi notable qu’inattendu

En 1456, le dauphin, Louis de France, en rébellion ouverte avec son père le roi de France, Charles VII, s’était réfugié à la cour de Philippe le Bon, duc de Bourgogne, qui lui avait accordé une magnifique et dispendieuse hospitalité en lui abandonnant le château de Genappe, près de Nivelles, pour y faire sa résidence.

Charles VII décéda le 22 juillet 1461 dans son château de Melun-sur-Yèvre, près de Bourges. Le dauphin vit en cet événement sa délivrance. Il prit alors immédiatement des dispositions pour aller prendre possession de la couronne de France. Il engagea le duc de Bourgogne à venir au plus tôt auprès de lui, pour l’accompagner à Reims, en lui donnant rendez-vous à la ville d’Avesnes.

Le 1er août, le dauphin fit son entrée à Avesnes, où son arrivée fut annoncée par l’artillerie de la place. Il reçut les hommages du gouverneur, du prévôt, du mayeur et des jurés, auxquels s’étaient réunis les notables du clergé, de la noblesse et de la bourgeoisie.

Le 2 août, le duc de Bourgogne accompagné de son fils, le comte de Charolais (futur Charles le Téméraire) arriva à Avesnes. Le futur roi reçut les grands dignitaires et les députés des parlements et des villes de France.

Il fit célébrer dans l’église de Saint-Nicolas les vigiles des morts. L’église avait été décorée de tentures noires portant des écussons aux armes de France. On avait élevé, dans le chœur, pour le dauphin, un dais en forme de trône, orné de somptueux tapis, et, au milieu de la grande nef, un haut catafalque revêtu de drap noir et dont les coins étaient gardés par quatre hérauts d’armes (Auguste Lebeau, Archives historiques du nord de la France et du midi de la Belgique, l ère série, tome IV, page 477).

Au centre de ce monument funéraire, qu’éclairaient quatre ou cinq cierges, se trouvait un cénotaphe couvert « d’un très riche drap cramoisy, dont le tissu estoit tout d’or. Parmy l’église, sans les chieges qui sont de coutume tout à l’enthour du cueur (chœur) et de la nef, il y avait cent torses (torches) enveloppées chacune de trois aulnes de drap noir, et armoyées des armes de France ; et furent les portans (porteurs de torches) tous vestus de noir Et en y avoit chincquante aultres aussi, que aultres gens portoient, non vestus de noir, mais sallariés d’argent » (Georges Chastelain, Chronique des ducs de Bourgogne I ère partie, chapitre III)

Le lendemain, le lundi 3 août, un service solennel pour le repos de l’âme du feu roi fut organisé dans l’église paroissiale. Ce service fut chanté par l’archevêque de Bourges. Le dauphin, le duc de Bourgogne, le comte de Charolais, le comte d’Étampes, Jacques de Bourbon, Adolphe de Clèves et plusieurs autres grands seigneurs de France et des Pays-Bas, tous en noir, composaient le deuil. Au service, qui fut fait avec pompe et solennité, assistèrent également les abbés de Liessies et de Maroilles qui s’y firent remarquer par la richesse de leurs vêtements sacerdotaux.

Grace à G Chastelain (1415 1475) chroniqueur et historiographe des ducs de Bourgogne, nous en apprenons un peu plus sur l’intérieur de l’église d’Avesnes.

1477 : Une église saccagée

La mort de Charles-le-Téméraire duc de Bourgogne, survenue le 5 janvier 1477 combla de joie Louis XI et lui parut une occasion propice pour s’emparer de ses États dont la succession venait d’échoir à sa fille unique, Marie de Bourgogne, encore mineure et sans défense. Avesnes, qui n’était qu’à quelques lieues de la frontière française, se vit très vite menacée par les troupes royales. Les habitants d’Avesnes refusèrent de se soumettre à Louis XI, attachés à la maison de Bourgogne. Louis XI qui seize ans auparavant avait été si bien accueilli dans cette même ville donna l’ordre de l’attaquer en juin 1477. Ce fut un véritable massacre accompli par les francs-archers qui la mirent à sac, la pillèrent et la brulèrent.

L’église paroissiale « qui était moult bien aornée » fut entièrement dévastée et livrée aux flammes. Elle gisait- à côté d’une grosse tour, solide encore, quoique réduite à ses seules maçonneries- en un vaste amas de matériaux informes, noircis, à demi brûlés ou calcinés, surmonté, par ci par là, de portions de murailles restées debout, lézardées et partiellement écroulées ; de colonnes tronquées, à des hauteurs différentes ; d’autres, entières et avec leurs chapiteaux, supportant encore des fragments de murs, de voûtes, de nervures.

Mais trop épuisée, trop pauvre, pour entreprendre la restauration de l’édifice détruit, la population se limita à déblayer le terrain et à y élever, utilisant les anciennes maçonneries conservées, une construction légère, en charpentes et planches, pour y assurer provisoirement le service du culte.

Une première reconstruction à la fin du XVè siècle

Les choses étaient dans cet état lorsque des délégués d’Avesnes, en vertu d’une autorisation du conseil de ville de Mons du samedi 13 mars 1484 firent «  pourcaz en ceste ville, des grandes aulmosnes des bonnes gens pour reconstruire leur église, rédiffié de bos après la destruction par les François : attendu que il n’en avoient que par emprunt une seulement (Registre des délibérations du conseil de ville de Mons du 13 mars 1483).

Cette reconstruction fut achevée avant 1503 car lors du baptême  en juillet de cette année d’Englebert, deuxième fils du prince de Chimay il est dit que « la grande esglise de la ville estoit richement tendue de tapisserie et fort bien parée » (François Vinchant Annales de la Province et Comté de Haynau… v 191).

L’incendie de 1514

Avesnes était entièrement reconstruite et repeuplée lorsque se déclara le 24 ou le 25 juin 1514 un incendie qui porta ses ravages jusqu’aux extrémités de la ville. La maison de paix avec les archives, les édifices publics comme les bâtiments particuliers, tout devint la proie des flammes. L’église à l’exception du chœur, n’échappa pas à cet incendie désastreux.

Dans cette même année, mais sans que l’on sache si c’est avant ou après l’incendie, on fit fondre, pour le service de l’église, une cloche qui existait encore au XIX e siècle à la tour. On est tenté de croire que les anciennes cloches ont été détruites par le feu et que, de leurs débris, on en a fondu de nouvelles. Dans ce cas, il faut alors admettre que la tour n’avait pas été fortement endommagée.

La reconstruction de la nef 1520-1550
Les Voûtes

La princesse Louise d’Albret, épouse de Charles de Croy, lui-même parrain de Charles Quint, contribua par ses libéralités à la réédification de l’église.

En 1531, le 5 décembre, Louise d’Albret fit don de 300 livres, payables après sa mort « sur le plus clair de ses meubles » aux prêtres établis pour la célébration du cantuaire fondé par elle en l’église St Nicolas d’Avesnes (Inventaire des archives de la pairie d’Avesnes 433). Il y avait donc une chapellerie à l’intérieur de l’église fondée pour l’âme de la Dame d’Avesnes

En 1533, la voûte de la grande nef n’était pas encore achevée car la restauration coutait très cher.

Animée d’une fervente piété, Louise d’Albret avait affecté ses épargnes à la rénovation de l’église, qui n’avaient cependant pas suffi. La ville, de son côté, y avait consacré toutes ses ressources et on s’ingéniait à en créer d’autres. On en vint à imposer, aux locataires des biens du cantuaire de Penthièvre, situés à St Saulve, outre les pots-de-vin et les fermages ordinaires, en 1544 la somme de 500 livres à payer en une fois et en 1558 la somme de 500 florins à acquitter en cinq ans, pour le tout être employé aux ouvrages de l’église (Baux de 1544 et 1558 dans le Livre Rouge  de la ville d’Avesnes).

Au moyen de plusieurs ressources de ce genre, un marché dont font mention les archives de la ville put être conclu entre le gouverneur, le mayeur, les jurés d’Avesnes et Grégoire de Sémeries, maitre tailleur, pour livrer et travailler entièrement les pierres des verrières de la façade de l’église, des ogives et autres petites verrières des bas-côtés.

Il fallut attendre 1549 pour que les meneaux et les vitraux fussent placés aux fenêtres.

Il ne parait pas que la tour et le chœur eurent autant à souffrir de l’incendie de 1514 que le vaisseau. Le fait est qu’en 1549, on se bornait à raccommoder les quatre piliers de côté de la tour (Marché du 3 février 1548 n,st 1549 dans le Livre Rouge précité) avant que, le 17 aout,  venant du Quesnoy et de Landrecies Charles Quint fit sa joyeuse entrée.

Quant au chœur, environné de fortes murailles dont la construction remontait vraisemblablement vers la fin du XII e siècle, et voûté solidement, dans le XV e siècle, en briques soutenues par des arcades de pierres surbaissées ou en anses de panier, il n’est pas étonnant qu’il ait résisté au feu.

Un des plus beaux exemples d’église-halle

La reconstruction de la nef prit certes du temps mais elle procure sans nul doute un des plus beaux exemples d’église-halle par son unité, sa simplicité et son ampleur. Flanquée des deux côtés de chapelles latérales, dans le goût espagnol, et dont les murs séparatifs servent à contrebuter les voûtes, elle fut reconstruite avec beaucoup de grâce.

Le vaisseau est vaste et divisé en trois nefs, séparées par des arcades en larges pierres de taille que soutiennent de hautes colonnes au nombre de huit, ou de quatre de chaque côté.

Le vaisseau central est long d’environ quarante mètres, large de neuf et culmine à une vingtaine de mètres. Les collatéraux atteignent pratiquement la même hauteur. La largeur de l’ensemble atteint vingt neuf  mètres en façade. De nos jours l’intérieur de l’église offre dix chapelles latérales.

Cette nef halle a très peu d’équivalent en France. On retrouve en revanche en Belgique des constructions analogues au premier rang desquelles l’église Saint Pierre Saint Paul de Chimay qui lui est contemporaine.

Les voûtes resserrées et comme encadrées entre des arceaux de pierres en ogives et à côtes n’ont d’épaisseur que la largeur d’une brique, et ne plaisent pas moins par la légèreté qu’elles n’étonnent par la hardiesse : il semble qu’il suffise d’un choc, de la moindre lézarde, pour les précipiter sur le pavé et pourtant elles subsistent intactes depuis cinq siècles. Judicieusement, ces voûtes en arêtes avec nervures en pierre forment des arcs doubleaux et entrecroisés.

On entrait alors par cinq portes, trois cintrées, toutes trois de front, qui subsistent, et deux latérales dont il ne reste plus de traces.

L’intérieur était éclairé par treize fenêtres oblongues, terminées en ogives, mais disparates. De nos jours il est éclairé par dix neuf fenêtres à encadrement en pierre bleue et en partie à meneaux toujours d’inégale hauteur et de largeur.

Dix piliers et dix têtes de mur supportent 17 arcades dont 15 sont en arcs tiers-point plus ou moins aigu et deux en plein cintre.

Le jubé, avec une balustrade et quatre colonnes en marbre de différentes couleurs et de forme semi circulaire, se situait à l’entrée du chœur. On distinguait sur le jubé un grand crucifix qui touchait à la voûte du chœur, le christ passait pour avoir été sculpté au couteau par des prisonniers. La tribune fut déplacée en 1745 au dessus de la porte d’entrée principale entre les bancs de Messieurs du Magistrat et celui dit du Prince, le christ demeurant dans le chœur.

En mai 1719 une Chaire de vérité de forme octogonale, ornée de bas-reliefs, fut donnée par Étienne Mutte, un officier de l’évêque de Gand.

Une église en collégiale en 1534

En 1533, la princesse d’Albret fit ériger l’église en collégiale en fondant un chapitre qu’elle dota de treize prébendes dont la collation fut confiée au vénérable abbé de Blois et à ses successeurs.

Un curé et deux vicaires avaient jusqu’alors desservi la paroisse. Le chapitre fut composé d’un prévôt, d’un doyen, d’un chantre, d’un écolâtre et de huit autres chanoines du nombre auxquels il y était ajouté le curé de la paroisse, chanoine né. Outre les revenus affectés aux prébendes, la fondatrice assigna sur ses épargnes des fonds suffisants pour les gages d’un bâtonnier, de six enfants de chœur, d’un maitre de musique, d’un organiste et le salaire des sonneurs. Mais le chapitre demeura chargé de l’entretien du chœur et de celui de deux chapelles latérales, dont la princesse lui avait abandonné le patronage, celle de saint Jean Baptiste et celle de sainte Marie Magdeleine, collectivement désignées dans la clause d’abandon, de chapelles du château.

Le pape Clément VII approuva la fondation du chapitre d’Avesnes par un bref du 30 juillet 1533. Le titre de cette fondation ne fut néanmoins dressé que le 10 avril 1534. La princesse de Chimay et dame d’Avesnes mourut le 12 septembre 1535 et ses funérailles eurent lieu avec une grande pompe le 12 octobre dans la collégiale où elle fut inhumée (livre du prône de l’église d’Avesnes de 1529 à 1544 Bibliothèque de Lille F A N°42).

Son fils Philippe de Croy, ratifia le 3 janvier 1536 l’œuvre de sa mère. Toutefois, les six vicaires qu’elle avait eu le projet d’adjoindre aux chanoines pour les suppléer en cas de maladie ou d’absence ne furent pas institués. Un des treize canonicats qu’elle avait créés fut supprimé à la mort du premier chanoine, et la prébende qui y était attachée se répartit entre les autres membres du chapitre.

Les douze chanoines habitaient autour de l’église, rue de Berry et rue d’Albret qui fut d’abord la rue des Lombards.

Les boiseries de 1534

II existe dans les deux premières chapelles latérales de l’Église d’Avesnes, celle de droite, chapelle du Rosaire et celle de gauche, fonts baptismaux, des boiseries intéressantes par leur ancienneté. Elles remontent en effet à la reconstruction de ]’Édifice par Louise d’Albret et faisaient partie des premiers revêtements lambrisses dont fut ornée la collégiale lors de la fondation du Chapitre.

Ces panneaux de chêne, très simples par eux-mêmes, sont séparés par des bandes d’environ huit centimètres ornées de fines sculptures en plein bois dans le style Renaissance. ces ornements figurent, soit des motifs purement décoratifs, soit des attributs allégoriques de métiers ou d’arts différents.

L’histoire de ces boiseries qui portent la date de 1534, date de la fondation du chapitre, n’est pas dépourvue d’intérêt. Elles n’ont pas toujours été placées là où nous les voyons aujourd’hui. Elles ont été faites, à l’origine, pour garnir le fond du chœur, les murs de l’abside auxquels étaient adossées les stalles des chanoines.

Le 18 septembre 18o4, le conseil de fabrique s’étant réuni pour statuer sur certaines questions il fut, entre autres choses décidé que «la boiserie existante au fond du sanctuaire serait réparée ». C’était le moment où l’Église venait d’être rendue au culte et où le nouveau curé-doyen, Philippe-Joseph Bonnaire, installé depuis le 28 février 1803, travaillait activement à la restauration paroissiale.

En 1851, les panneaux en question furent transportés dans les deux premières chapelles latérales. Celle du Rosaire qui autrefois, même après la Révolution, contenait les fonts baptismaux, possédait des boiseries datant de 1769 et qui avaient été établies par le sieur Colinet, menuisier à Avesnes, pour la somme de 400 livres. Elle comportaient des armoires et un confessionnal qui existait encore après la Révolution.

Quant aux boiseries actuelles du chœur, qui sont l’œuvre également d’un menuisier local, elles n’ont rien de remarquable. Notons seulement encore, comme disposition différente, que les stalles étaient, avant ces modifications. placées contre les grilles en bois qui fermaient sur les côtés le prolongement du chœur vers la nef.

Le mausolée de Louise d’Albret

Le chapitre, en signe de profonde reconnaissance envers leur fondatrice, fit élever, dans le chœur de l’église, à gauche, un mausolée en marbre noir, supportant un prie-Dieu de même marbre sur lequel une statue en marbre blanc de la plus belle qualité représentait Louise d’Albret (Expilly ,333). On admirait la princesse agenouillée, priant, les genoux appuyés sur un coussin où reposait un petit chien, et les mains jointes au dessus d’un livre d’heures ouvert devant elle. Couverte d’un manteau qui descendait du haut des épaules jusqu’aux talons, et coiffée d’un couvre-chef à barbes, surmonté d’une couronne ducale, la princesse avait une pose simple, naturelle (Lebeau Précis de l’histoire d’Avesnes). Ce monument, comme tous ceux qui existaient dans l’église en 1793, fut alors détruit.

On y remarquait encore dans ces premières années de la révolution, le tombeau de Jean d’Aneux et l’épitaphe du marquis de Crèvecœur, deux anciens gouverneurs d’Avesnes.

Le tombeau, large sarcophage, en marbre blanc, surmonté de la statue de Jean d’Aneux à genoux et les mains jointes vis-à-vis un crucifix, était renfermé dans une cellule adossée extérieurement au mur du fond de la quatrième des chapelles de gauche. Il tirait du jour par une large fenêtre du côté de la rue, et, par un treillis du côté de la chapelle.

D’épitaphe du marquis de Crèvecœur était gravée en lettres d’or sur une table de marbre noir ornée d’emblèmes en marbre blanc, entre autres de deux mains s’allongeant comme pour se prendre et tenant chacune un cœur enflammé (Lebeau Précis de l’histoire d’Avesnes).

Un carillon en 1549

On fonda douze cloches pour les joindre à l’horloge. Ce carillon fut le premier qu’ait eu Avesnes. A cet ensemble s’ajoutait des cloches de volée dont en particulier la grosse cloche donnée par Charles Quint en 1514 et nommée pour cette raison Charlotte. Elle avait été fondue par Simon Wagheven, fondeur de Malines, et portait la devise  » Vive Bourgogne « . Quant à l’horloge, elle fut remplacée le 29 janvier 1769.

D’autres timbres furent rajoutés pour arriver en 1791 à 30 cloches. La ville payait alors un carillonneur – organiste 500 livres par an indépendamment des sonneurs et des guetteurs.

Le Carillon ne cessa de fonctionner pendant la Révolution.

Le carillon de nos jours vient de l’abbaye de Liessies, il avait été fondu à Louvain en 1767 et 1768.  Il a été remis en état en 1884

En 1917 six cloches furent descendues avec peine par les Allemands mais restèrent à Avesnes. L’ensemble fut reconstitué sans trop de difficultés en 1923.

Mais le 2 Septembre 1944 alors que les troupes américaines entraient en ville, le drapeau français fut hissé au sommet de la tour. Les troupes allemandes restées à proximité lancèrent un obus incendiaire qui détruisit le Beffroi et occasionna la chute de l’instrument. Seule Charlotte en raison de son poids ne fut pas brisée mais seulement fêlée. Le dôme et la toiture ont été rétablis en 1950.

Le dôme en 1550

Nous avons vu qu’en 1549 on raccommodait les piliers de la tour. En 1550 on travaillait encore à la restauration de cette grosse tour quadrangulaire qui surmonte l’église. Cette masse énorme ayant pour base que quatre piliers fut revêtue de belles pierres-de-taille bleues. C’est de ce moment que date le dôme à pans octogones qui couronne cette tour, précédemment terminée par une terrasse à créneaux. La tour et son dôme culminent à soixante mètres de hauteur.

On y ajouta un campanile où logea un guetteur jusqu’en 1815. Ce logis de guetteur était  destiné à surveiller la frontière de France qui passait à une douzaine de kilomètres au sud à la limite de l’actuel département de l’Aisne. Jusqu’à la Paix des Pyrénées en 1659, Avesnes était l’une des principales places fortes qui défendaient les Pays-Bas contre les incursions françaises. C’est la raison pour laquelle la ville fut acquise en 1556 par Philippe II d’Espagne et détachée de la Terre d’Avesnes.

La tour surmontée de son dôme octogonal, surmonté d’une lanterne et flanqué de quatre poivrières aux clochetons placés en encorbellement mesure 66 mètres au dessus du sol.

Nous pouvons nous faire une représentation plus précise de cette tour grâce à ce plan établi par Louis Guichemin, un italien qui s’était fixé à Anvers et qui publia vers 1570 une « description des Pays-Bas » qui contenait les plans imagés de la plupart des villes du pays.

Plan de Guichemin

Nous pouvons y voit la tour massive a été reconstruite et renforcée en bas par les deux collatéraux. la tour est crénelée, couverte d’une plate-forme sur laquelle circule le guetteur. La nef principale est beaucoup plus haute que les bas-côtés. Un double rang de fenêtres marque, tant sur la nef que sur le collatéral, le côté méridional. le toit de la nef comporte le même clocher avec flèche comme les cathédrales. Le transept est très marqué, l’église ayant la forme d’une croix latine, et la façade de transept qui fait saillie, comporte un portail. le choeur , beaucoup plus bas que la nef, a une forme rectangulaire. Il se termine par un pan coupé. Il sera reconstruit en 1617, l’incendie de 1514 l’ayant probablement fragilisé.

La restauration du chœur en 1617

Le Chœur est nettement plus ancien que la nef et la tour.

II est bon de rappeler que, jusqu’en 1857, le chœur avait conservé la forme, les dimensions et le mobilier qu’il avait reçus au moment de la création du Chapitre. II s’avançait dans l’Église jusqu’à la première colonne et était fermé sur les côtés par deux grilles en bois, hautes de quatre mètres environ. L’entrée était fermée par une grille de fer.

L’autel était placé dans l’avant-chœur vis-i-vis des stalles actuelles et, derrière l’autel, dans l’hémicycle, se trouvaient les stalles des chanoines adossées aux boiseries en question.

Il revenait au chapitre la charge d’entretenir le chœur de l’église : l’ancien propriétaire, l’abbé de Liessies, le lui ayant cédé à condition de payer les restaurations (ADN série G H n° 21479 Registre de la Collégiale d’Avesnes N° 6 bis folio 34 Chapitre à l’Archevêque).

Cette convention fit, en 1614, l’objet d’un litige entre le chapitre et l’abbé de Liessies. Le chœur ayant alors besoin de réparations et les chanoines s’abstenant d’y pourvoir, l’abbé, patron de l’église, somma le prince de Chimai, patron du Chapitre, d’entreprendre les travaux. Et comme le prince refusait, l’abbé interdit toute célébration d’office dans le chœur (1).

C’est seulement le 27 octobre 1616, et sut l’intervention sollicitée de l’archevêque de Cambrai, que le Chapitre obtint de reprendre ses offices après s’être engagé à «mettre la main à l’œuvre de la restauration du dit chœur, en dedans le mois d’apvril ou mai tant au plus tard de l’année prochaine »(2).

C’est aussi le Chapitre qui fit construire à ses frais la chapelle de Saint-Nicolas, en 1519. II fit venir des experts, notamment le bailli de Maroilles, pour examiner les piliers destinés à supporter l’ogive et il fit faire les ogives de cette chapelle par des tailleurs de pierre de Lez-Fontaine (3). En 1783 il fit aussi réédifier la sacristie.

(1) : ADN Registre de la Collégiale d’Avesnes n° 6 bis folio 19 Prince de Chimai aux chanoines folio 20

(2) : ADN Registre de la Collégiale d’Avesnes n° 6 bis folio 34 Chapitre de l’Archevêque

(3) : ADN Registre Capitulaire contenant les comptes du chapitre St Nicolas de 1519 à 1613; Compte de 1519

Le chœur dans son état actuel

Dans son état actuel il comprend une abside demi-hexagonale correspondant à des réfections de 1617. Les trois travées qui suivent remontent à la construction qui existait en 1461 lors de l’investiture de Louis XI. L’une des clés de voûte d’origine a été conservée. Elle montre deux masques grimaçants l’un montrant les dents et l’autre tirant la langue d’une esthétique toute romane. Des faisceaux de cinq colonnettes donnent naissance à des nervures élégantes, dont les unes s’arrondissent en arcs pleins cintre, tandis que les autres s’allongent en arcs ogive ou s’élargissent en arcs doubleaux et entrecroisés qui aboutissent à des pendentifs cylindriques.

Les dimensions de la collégiale en 1649

En nous reportant a un ancien manuscrit, nous voyons que l’édifice avait, en 1640, les dimensions suivantes : Longueur 53 mètres 50 ; longueur de la grande nef, 31 mt 50 ; longueur du chœur, 22 mètres ; largeur totale, 25 m. 50 centimètres ; largeur de la chapelle de droite, 3 m 63 ; largeur de la chapelle de gauche 2 m. 84, largeur de la nef de droite, 5 mètres ; largeur de nef de gauche, 4 mètres 25.

En un autre temps, le chœur avait eu 11 métrés de longueur sur une largeur de 7 mètres  50 ; les chapelles de la Vierge et de Saint-Nicolas avaient, chacune, 8 mètres, avec une profondeur de 4 mètres 50 à partir de la bordure qui soutenait la balustrade.

Des incendies causés par la foudre éclatèrent au clocher le 3 février 1666, le 10 juin 1783, le 25 décembre 1811. Le paratonnerre fut installé en 1812. Le guet était fait par un employé salarié, chargé de signaler 1’approche d’une troupe ou la déclaration d’un incendie ; le droit du guet était dû par dix huit villages de la terre d’Avesnes (Fonds  Gravet Jennepin ADN 92 J 34).

La Tour et les orages

Texte du 14 juin 1858 écrit par A.L.Bourgeois membre de la Société Archéologique de l’arrondissement d’Avesnes sur Helpe

Au moment où l’on se félicite, à Avesnes, de voir établir un paratonnerre sur la tour de l’église, on ne sera peut-être pas fâché d’avoir quelques renseignements sur les périls que les orages de trois siècles ont fait courir à un édifice qui s’élève à une hauteur de 58 mètres 25 centimètres, sur un plateau auquel le bureau des longitudes attribue une altitude de 172 mètres. Quelques lignes suffiront pour résumer tout ce qu’apprennent, à ce sujet, les archives communales.

Après un mois d’une gelée très intense, la neige tombait abondamment le mardi 3 février 1666, et rien ne faisait présager un orage, quand, à midi précis, une effroyable détonation ébranla toute la ville, et presque aussitôt la cloche d’alarme se fit entendre. La foudre venait de tomber verticalement sur le dôme de -la tour, au-dessus de la fenêtre qui regarde le midi, et avait embrasé l’extrémité inférieure de la face correspondante de la lanterne, vulgairement désignée sous le nom de baraque du guetteur. L’incendie, attaqué avec vigueur, ne fit que des dégâts insignifiants ; avant une heure, il était complètement éteint et les Avesnois s’empressaient de rentrer chez eux, trop heureux qu’une alerte aussi vive n’ait pas eu pour eux de conséquences plus fâcheuses qu’un diner refroidi. Car, à cette époque, sous l’ample bonnet de dentelle comme sous l’humble cornette « à petits plis », il n’y avait point d’Avesnoise qui n’eût cru grandement compromise sa réputation de « femme de ménage », si, chez elle, « la soupe » ne s’était point trouvée sur la table avant le premier coup de douze heures. L’émoi du lendemain de la Chandeleur n’était pas complètement oublié, et il défrayait encore parfois la conversation des bourgeois attablés devant une a canette » de cervoise; ou de bière d’absinthe, si la circonstance autorisait quelque extra, lorsque, le jour de la Pentecôte 1668, de grand matin, « la foudre s’attacha de nouveau à la tour » pour reproduire les termes de la note laconique, qui fait connaître l’événement, sans mentionner aucune des particularités qui ont pu le-caractériser. Tout ce qu’il est possible d’en dire, c’est qu’il y eut à peine un commencement d’incendie.

Le danger fut plus sérieux cent quinze ans plus tard, le 19 juin 1783, jour de la Fête-Dieu. Vers neuf heures du soir, le tonnerre tomba à peu près au même endroit qu’en 1666, et embrasa la fenêtre du dôme, qui fait face au midi. L’espèce de procès-verbal qui mentionne l’accident, sans être très explicite, signale « le zèle et l’activité » que déployèrent, dans cette circonstance critique, MM. du Magistrat, les bourgeois et la garnison ; et, en parlant de plusieurs plaques de plomb complètement fondues, il semble laisser percer un assez vif sentiment d’effroi. Aussi l’alarme dut être grande à Avesnes, le 3 août de la même année, entre cinq et six heures du soir, quand, au milieu des réjouissances de la « kermesse », un ouragan furieux, accompagné de violents coups de tonnerre, fondit tout-à-coup sur la ville. Une véritable avalanche de grêlons, de la grosseur d’un œuf, fracassa les toitures et les fenêtres, non seulement de la tour et de l’église, » mais de toutes les maisons de la ville, et étendit ses ravages, dans la direction de l’ouragan, du sud-ouest au nord-est, sur une zone de 13 à 14 lieues de longueur et de trois au moins de largeur. Cependant les tempêtes des passions humaines effacèrent bientôt le souvenir de celles de l’atmosphère, et quand, dans les premières années du XIX e siècle, les Avesnois se trouvèrent exposés à un effroyable désastre, presque tous s’imaginèrent que c’était la première fois qu’un orage mettait en péril leur tour et leur église.

Ce fut dans la nuit du 25 décembre 1811 qu’eut lieu l’accident qui a si vivement frappé ceux qui en ont été les témoins, qu’encore aujourd’hui les moins impressionnables ne peuvent guère en parler sans que leur langage ne trahisse une certaine émotion. La foudre tomba sur la partie septentrionale du dôme et, tout-à-coup, la fenêtre qui s’ouvre de ce côté livra passage à une gerbe de flammes d’un éclat effrayant. Quand les premiers secours arrivèrent, le plomb fondu ruisselait de toutes parts et semblait devoir rendre impossibles toutes les tentatives de sauvetage. Un couvreur néanmoins, aidé de quelques hommes aussi intrépides que lui (1), parvint à couper une poutre, et arrêta ainsi les progrès de l’incendie. L’épouvante avait été si grande, qu’on songea un moment à abattre le sommet de la tour à coups de canon ; expédient singulièrement énergique, mais sur l’efficacité duquel des personnes compétentes pourraient seules prononcer.

Fort heureusement qu’en 1840 on n’eut besoin ni de celui-là, ni d’aucun autre. Un orage, en effet, se forma à l’improviste le 16 janvier de cette année, vers quatre heures après-midi, et au premier coup de tonnerre, le fluide électrique tomba ou plutôt glissa le long de la partie orientale de la tour ; mais il se releva brusquement à angle droit en rencontrant le faîte métallique du toit de l’église, et signala seulement son rapide passage en faisant voler en éclats une grande quantité d’ardoises.

Depuis cette époque, la foudre n’a plus atteint la tour d’Avesnes, et dans quelques jours la ville sera enfin délivrée de la crainte de voir s’embraser soudainement une véritable forêt de poutres séculaires, suspendues à une hauteur où les moyens ordinaires de combattre les incendies deviendraient, sinon inapplicables, du moins a peu près illusoires : car, si dans les accidents de 1666, 1783 et 1811, on put, sans trop de difficultés, se rendre maître du feu, c’est que, chaque fois, il fut signalé et attaqué avec une promptitude que la meilleure volonté et la plus .active prévoyance ne rendraient pas toujours possible.

(1) La notoriété publique désigne MM. Yandy, couvreur, Haller et Meurant, chasseurs de la garde impériale, en permission dans leur ville natale au moment du sinistre. Il y aurait certainement bien d’autres noms à citer, si l’on possédait un procès-verbal détaillé de l’événement.

Le buffet d’orgue 1706

Le 24 septembre 1706, l’église reçut un buffet d’orgues, on disait alors un cabinet d’orgues, fourni pour 650 livres monnaie de France par un facteur de Reims et appelé à remplacer  celui qui était hors service.

Le pavement et autres travaux

L’adjudication pour le pavement de l’église eut lieu le 20 décembre 1746, messire Antoine Rotrou étant curé du Chapitre, puis vinrent les travaux spéciaux de la chapelle du Rosaire en 1768. On remarquait dans cette chapelle outre les boiseries et ornements, un confessionnal qui a existé jusqu’au XIX è siècle ; il était occupé par un ancien chanoine d’Avesnes Philippe Jespart, qui était devenu clerc paroissial et aumônier de l’hospice lors du rétablissement du culte. Le père Philippe, comme on l’appelait vulgairement, mourut le 30 juin 1820, à l’âge de 75 ans (Mgr Sonnois, archevêque de Cambrai Bulletin des fêtes du IV centenaire de N D des mouches).

Les pignons extérieurs des chapelles qui ont été démolis qu’après 1815, le couronnement de la tour, les différentes armoiries gravées sur les clefs de voûte rappellent l’occupation de la ville par les Espagnols à l’époque de Charles-Quint et Philippe II. Enfin le monument du prince et de la princesse de Bretagne qui se trouvait dans l’épaisseur de la muraille entre le chœur et la chapelle de la Ste-Vierge, fut déplacé, pour être mis dans le chœur même, au niveau du mur d’enceinte. (Mgr Sonnois …)

Le Mobilier

Les déprédations révolutionnaires ont fait disparaître les tombeaux d’Olivier de Bretagne et de Louise d’Albret, le Grand Christ du Tref et les stalles des chanoines.

Les évènements de 1944 ont eu raison du jubé du XVIème siècle et des derniers vestiges des lambris des stalles. Il reste néanmoins un mobilier important et remarquable :

* deux retables baroques du début du XVIIème siècle dans les chapelles Sainte-Anne et de tous les saints

* un rare banc de confrérie du XVIème siècle

* des retables du XVIIIème siècle avec leurs tableaux

* le cénotaphe à la mémoire de Jean Laurent et François de Solis, soldats espagnols de l’armée de l’archiduc Léopold Guillaume pendant le siège de La Capelle en 1650

* le monument funéraire d’Adrien de Blois en marbre rouge du XVIème siècle

Malheureusement les grandes boiseries d’époque Louis XV qui garnissent la chapelle de la Vierge et la chapelle Saint Nicolas avec leurs tableaux de Louis Watteau subirent l’incendie du 5 avril 2021.

Des illustres personnages liés à la collégiale

La collégiale d’Avesnes a vu passer d’illustres personnages de l’histoire de France. De Louis XI y faisant célébrer les funérailles de son père le roi Charles VII, à Louise d’Albret dame d’Avesnes et de Chimay en passant par Charles Quint, Marie de Médicis, Louis XIV venu le 9 juin 1767 ou encore Napoléon Ier venu prier les dieux des armées le 13 juin 1815.

Notice sur le chapitre de Saint-Nicolas d'Avesnes

Notice de M Bourgeois Membre de la Société Archéologique d’Avesnes (1856)

Louise d’Albret avait une affection et une dévotion toutes particulières pour l’église de Saint-Nicolas d’Avesnes. Elle la fit ériger en collegiale le 10 avril 1534. Depuis assez longtemps elle y entretenait des vicaires chargés de réciter les heures canoniales et de chanter des obits. Après avoir obtenu le consentement du Pape, et s’être préalablement entendue avec l’Abbé de Liessies, collateur de la cure de Saint-Nicolas, elle fonda treize prébendes dans son église de prédilection pour un Chapitre compose d’un Prévôt, d’un Doyen et de onze autres chanoines. L’une de ces prébendes fut intégralement et indivisiblement unie à la cure d’Avesnes, et laissée la collation de l’Abbé de Liessies , qui , par compensation, donna aux chanoines la jouissance du chœur à charge toutefois de l’entretenir à perpétuité, et de permettre au Curé d’y célébrer des offices à des heures convenables. II leur abandonna également le droit de pourvoir à toues les chapelles qu’il possédait à Avesnes. La fondatrice se réserva, pour elle et pour ses successeurs, la collation des douze autres prébendes,sous la condition de n’en investir que des ecclésiastiques. Indépendamment d’une prébende, elle attacha à la Prévôté un fief de son domaine , comprenant dix rasières de terre, et situé au lieu vulgairement nommé Le Tronquois, vers la Chapelle de Ghodin. Elle nomma directement le premier Doyen ; mais elle ordonna que désormais ce dignitaire serait, à chaque vacance, élu par le Chapitre et pris dans son sein. L’élection devait toutefois être ratifiée par l’évêque de Cambrai. Une fois l’approbation épiscopale obtenue l’élu devenait le deuxième personnage de son corps, « l’œil du Chœur » et c’était à lui qu’incombait la charge des âmes des chanoines et des autres prêtres de l’église. Le Curé venait immédiatement après le Doyen dans l’ordre des préséances; il était tout la fois chanoine prébendé et chef de la paroisse de Saint-Nicolas. Quand il officiait à l’occasion de sa prébende, il avait pour diacre un chanoine, et pour sous-diacre un vicaire ou un chapelain ; dans les mêmes circonstances, le Prévôt et le Doyen avaient l’un et l’autre deux chanoines pour assistants.

Un chanoine qui avait le titre de Chantre., remplissait ordinairement les fonctions de choriste. Dans les fêtes doubles et triples, il était aidé par l’écolâtre, un de ses confrères, qui était en outre investi, sous la direction du Chapitre , de toutes les attributions indiquées par sa qualification.

Tous les chanoines, mêmes les dignitaires, étaient astreints à la résidence. Une absence, non autorisée du Chapitre , entrainait la privation des fruits de la prébende, dont on faisait deux parts : avec l’une on indemnisait un vicaire ou un chapelain délégué temporairement dans les fonctions de l’absent ; l’autre était attribuée , à peu près exclusivement, à la Mense Capitulaire, conforme à des statuts dont l’acte de fondation ordonne la rédaction et indique les principes generaux, comme de suivre le rite de Cambrai , de se conformer aux observances des autres collégiales du comté de Hainaut, etc., etc.

Quant aux intentions particulières de la fondatrice, elles sont explicitement formulées : 1 tous les jours une messe solennelle, et la récitation des heures canoniales dans l’église ; 2 Cinquante obits chaque année 3 Tous les jeudis une messe du Saint-Sacrement ; 4 Tous les samedis une messe basse en l’honneur de la Sainte Vierge, pour la conversion du plus grand pécheur de la terre; 5. Tous les lundis une messe basse pour l’âme la plus misérable du Purgatoire : 6 Les jours où le Prévôt, le Doyen ou le Curé officiaient à l’occasion de leurs prébendes, une messe basse à l’intention de la fondation, dite à tour de rôle par les chanoines qui avaient assisté les dignitaires.

Le Chapitre d’Avesnes dut entretenir un personnel assez nombreux : 1 Deux grands-vicaires chargées de commencer les heures en se relevant de semaine en semaine; 2 Quatre vicaires assistants, dont deux étaient clercs de l’église; 3 Six enfants de chant.; 4 Un maitre de musique ; 5 Un organiste; 6 Un carillonneur charg2 du soin de faire sonner les cloches.

Le total des charges annuelles du Chapitre s’élevait a 668 livres 8 sous.; en voici le détail : Pour 2 grands-vicaires, au traitement annuel de 48 liv chacun soit 96 liv. Pour 4 vicaires assistants, au traitement annuel de 40 liv chacun soit 160 Pour 6 enfants de chœur, an traitement annuel de 12 liv.chacun soit 72 Pour 1 maitre de musique, gouverneur des enfants de chœur 40 Pour 1 organiste 40 Pour 1 carillonneur ? 50 Pour le luminaire 110. Pour la fabrique, le chœur et les ornements de l’église 40. Pour une messe avec eau bénite, célébrée tous les dimanches dans la chapelle de Sainte Marie-Madeleine du Béguinage d’Avesnes 50 soit un total de 608 liv,8 s.

De plus les chanoines étaient tenus de donner tous les ans cinq muids de blé au Béguinage.

Outre le fief indivisiblement attaché à la Prévôté, Louise d’Albret destina à la dotation du Chapitre deux mille livres de rentes, provenant de ses économies. Louise d’Albret, Louis de Blois, abbé de Liessies, Jean Gobert, curé de Saint•Nicolas, le Chapitre, le Mayeur et les Echevins de la ville, souscrivirent l’acte de fondation , daté d’Avesnes le 10 avril 1534. Le Chapitre de Saint-Nicolas d’Avesnes fut installé par maitre Philippe vicaire général de l’évêque Robert de Croy, en présence de maitre Jean Mouscron, official du diocèse , et de maitre Eloi Waltriez , doyen de Saint-Géry de Cambrai.

Peu de temps après son installation, le Chapitre procéda à son organisation intérieure en rédigeant ses stators. Il est indispensable d’en reproduire les principales dispositions si l’on veut donner une notion suffisante de la collegiale de Saint-Nicolas. II fallait de Toute nécessité résider pour percevoir les fruits des canonicats.

Le chanoine nommé qui voulait prendre résidence, se présentait devant le Chapitre le 13 juin, à l’heure des vêpres, Sinon, il était ajourné à l’année suivante. II entrait en fonctions aux premières vêpres de la Saint Jean-Baptiste, et pendant quatre semaines consécutives, il assistait à toutes les heures diurnes et nocturnes, et ne pouvait sortir du chœur qu’avec la permission du Prévôt ou du Doyen, ou d’un délégué. de ces dignitaires , et seulement pour satisfaire aux nécessites corporelles sous peine d’être privé des fruits de l’année entière. Après avoir subi cette épreuve, qu’on appelait le mois de Résidence Périlleuse le nouveau résident payait une somme de douze livres Hainaut pour les ornements de l’autel et du chœur, et désormais, à moins qu’il ne fut de semaine, sa présence n’était requise que pour des parties determinées des offices de chaque jour.

Les chanoines pouvaient prendre vingt-quatre jours de congés dans le cours de l’année; en cas de maladie , ils étaient dispensés de tout service, sans rien perdre de leurs émoluments.

Les prescriptions des statuts avaient pour sanction des amender de quelques sous. Le maintain de la concorde entre les membres du Chapitre était assuré par une répression plus sévère : une retenue de quatre livres Hainaut pour une injure adressée à un confrère; pour une voie de fait, !’excommunication et la privation des fruits de la prébende, jusqu’à ce que le coupable eût reçu l’absolution de l’évêque, ou de son pénitencier, et donné satisfaction à l’offensé.

Les émoluments de chaque chanoine se composaient du 13è du casuel et des revenus disponibles de la fondation. Ils ne dépassèrent jamais 430 livres; le chiffre de 300 livres peut être regardé comme une moyenne plutôt enflée qu’atténuée. Le principe fondamental de la répartition des sommes provenant des obits, fondations pieuses, etc , etc., était que les chanoines recevaient toujours une part double de celle des habitués de l’église; Par contre, pour les mêmes infractions, ils subissaient toujours une revenue double de celle qui était infligée aux vicaires et chapelains. Bien entendu que pour avoir droit à une distribution résultant d’un office quelconque, il fallait y avoir assisté.

Le Chapitre se réunissait tons les vendredis pour traiter les affaires courantes, et pour établir ce qui revenait à chaque résident dans les produits de la semaine écoulée. II tenait en outre, chaque année, deux assemblées dites Chapitres Généraux, le jour de Saint Silvestre et à la fête des martyrs Jean et Paul , pour arrêter la comptabilité des deux semestres, dont le premier se terminait la veille de Noël, et le second la veille de la nativité de Saint Jean-Baptiste.

Si un chanoine venait à mourir après l’Assomption , ou le jour même de cette fête, les fruits de sa prébende, pendant tout le premier semestre, étaient acquis à sa succession. Il en était de même pour le produit du second semestre, si le décès avait lieu après la Purification, ou ce jour la même.

Si le Chapitre perdait un de ses membres avant l’une ou l’autre des deux dates ci-dessus indiquées , les fruits de la prébende du défunt, à partir du jour de la mort et pendant le reste du semestre, étaient appliqués à l’entretien du chœur et des ornements. Dans le cas où un résident décédait dans le cours du premier semestre , son successeur ne pouvant être admis à la résidence avant la Saint Jean Baptiste, le produit intégral dune prébende pendant le second semestre restait disponible , et était affecté à la dotation de la collégiale.

Le Chapitre avait an grand sceau et un petit. Le premier était gardé dans un ferme, dont le Prévôt, le Doyen et le plus ancien chanoine dans l’ordre de réception avaient chacun une clef. Le second était déposé dans les armoires du corps, dont les clefs étaient entre la mains de deux chanoines, designés tous les ans dans l’assemblée générale du mois de juin. Les dépositaires des sceaux qui en auraient fait usage autrement qu’en vertu d’une délibération capitulaire étaient privés des fruits de leurs prébendes, sans préjudice de peines plus graves, s’il y avait lieu.

Le jour même de la mort d’un chanoine, on récitait le psautier dans le choeur à l’intention du défunt. On prélevait sur sa succession quatre livres Hainaut, qui étaient réparties entre tous les assistants suivant le principe fondamental de toute distribution. C’était le Doyen qui célébrait les obsèques avec un décorum digne de l’état ecclésiastique. On prenait sur les biens du défunt 12 livres Hainaut, qui étaient distribués de la manière suivante : 1) Au Doyen 40 s 2)Au carillonneur 30 3) Pour le luminaire 30 4) Le reste aux chanoines et aux autres vicaires assistants

M Le Doyen présidait également aux funérailles des vicaires, chapelains et autres fonctionnaires de l’église. On ne prélevait que six livres sur ce qu’ils laissaient, pour les répartir proportionnellement aux sommes indiquées plus haut. Le Doyen, en sa qualité de curé du Chapitre , avait pour lui les offrandes des obsèques, tant en numéraire qu’en pains, et en outre le luminaire et les cierges des assistants.

Les chanoines pouvaient disposer de leurs biens meubles, soit en faisant un testament olographe, soit en dictant leurs dernières volontés en présence de deux témoins, au nombre desquels ne pouvait jamais se trouver le curé du lieu. Ils devaient designer un de leurs confrères comme exécuteur testamentaire. Celui-ci dressait l’inventaire de la succession et procédait à la vente des biens avec le contours du notaire du Chapitre: dans le Mai d’un an, à partir du jour du décès, il produisait ses comptes devant l’assemblée capitulaire. En vertu du droit de souveraineté de l’église collégiale, il était perçu trois deniers par livre sur le produit de la succession, et pareille sommes au profit des chanoines résidents et présents à l’examen de la gestion de l’exécuteur testamentaire. II était alloué 20 sous au notaire pour sa signature.

Les mêmes règles étaient applicables aux testaments des vicaires et chapelains , seulement l’exécuteur testamentaire pouvait être un de leurs collègues ou un chanoine; les honoraires du notaire étaient réduits à dix sous, et il n’était perçu que trois deniers par livre, tant pour l’église que pour la séance d’examen des comptes de la succession. II y avait encore une autre circonstance, où un droit de présence était attribué aux chanoines capitulaires : c’était pour la séance du 8 juin, quand il y avait lieu à admettre un nouveau titulaire à la première résidence. Dans ce cas, chaque chanoine présent recevait deux sous Hainaut. Quand un chanoine ou un autre prêtre de l’église mourait in-testa, le Chapitre disposait à son gré de ses biens meubles, en se conformant cependant, autant que possible, aux intentions presumées du défunt. II remettait à l’évêque de Cambrai le dixième du produit net de la succession.

En cas de décès du curé de Saint-Nicolas , ses exécuteurs testamentaires n’avaient de compte à rendre qu’à l’évêque de Cambrai; c’était à ce prélat que se payaient les droits de mutations, et que revenait la succession tout entière, si le défunt n’avait pas laissé de testament.

En entrant en possession de leurs offices respectifs, les chanoines , chapelains, vicaires, etc., etc, prêtaient serment de fidélité, de soumission et de dévouement au Chapitre, suivant une formule déterminée pour chaque position. Par une des clauses de leur serment, les chanoines s’engageaient à résider personnellement , sous peine de perdre les fruits de leurs prébendes, et à ne jamais se prévaloir d’aucun privilège à ce sujet, de quelque autorité qu’il émanât.

De son côté, le Seigneur d’Avesnes jurait à son avènement de maintenir et de défendre les libertés, franchises, etc., etc., du Chapitre dont il était le Patron. Les libéralités des particuliers paraissent s’être ajoutées a celles de Louise d’Albret pour doter les chanoines d’Avesnes. Un vieux titre apprend que Pierre Bracquenie, carpentier, pour et en augmentation de la fondation du vénérable collège et Chappittre d’Avesnes lui fit don , par acte authentique du 7 septembre 1535, d’une rente annuelle de quarante sous tournois. Selon toute vraisemblance, les imitateurs ne manquèrent pas à l’humble artisan qui gréva sa maison, sire dans les Basses-Rues, au profit du pieux établissement créé par une puissance princesses; Rolland Meurant, et ses successeurs, représentant la collégiale de Saint-Nicolas en leur qualité de receveurs, furent encore plus d’une fois  » adherités de rentes ou héritaiges, Bien et à loy pardevant les Prévôt et Eschevins ». Malheureusement les chanoines perdirent leur fondatrice le 12 septembre 1535, et des lors ils durent craindre de ne pouvoir maintenir intacte leur organisation, si même elle était déjà complétement réalisée; car on ne trouve aucune trace de l’institution des six vicaires. Quoiqu’il en soit, une de leurs charges fur clairement définie par une déclaration du 3 janvier 1536. Sur la demande de l’Abbé de Liessies, Philippe de Croy, qui avait succédé à Louise d’Albret , sa mère, dans la seigneurie d’Avesnes, précisa ce qu’il fallait entendre par l’entretien perpétuel du chœur de l’église de Saint-Nicolas mis à la charge du Chapitre par l’acte de fondation. Le prince décida que cette clause embrassait toute espèce de réparations intérieures et extérieures, et même, le cas échéant, la reconstruction partielle ou totale de l’édifice.

A la mort du chanoine Roysin , le Chapitre se fondant sur l’exiguïté de ses ressources, demanda la suppression d’un des treize canonicats, et la répartition entre les douze autres des fruits de la prébende éteinte. En faisant droit à cette requête par une sentence rendue le 15 janvier 1575, la tour de l’officialité de Cambrai attribua au décanat sur les produits du canonicat supprimé , une somme annuelle de douze florins.

Malgré la réduction de leur nombre, les chanoines de Saint-Nicolas furent encore loin d’être opulent. Les évaluations, qu’on rencontre ça et là, des fruits de leurs prébendes, variant entre 300 et 400 livres, sans qu’on trouve nulle part des renseignements suffisants pour établir un compte, sinon exact, du moins suffisamment approximatif de leurs revenus. On n’en volt qu’une espèce de nomenclature dans des conclusions du Vice-Promoteur de la tour de l’officialité de Cambrai : 1) Revenus des biens de la fondatrice; 2) Revenus des biens cédés par Philippe de Croy 3) Revenus de l’obituaire, etc., etc. Le No 1 est bien connu. Au moment de la fondation , Louise d’Albret donna à ses chanoines des titres constituant à leur profit un revenu net de 1333 liv. 3 s. 2 d., en s’engageant à ajouter successivement à cette dotation jusqu’à concurrence de deux mille livres Hainaut de rentes annuelles et perpétuelles; mais elle mourut avant d’avoir pu tenir sa promesse, et tout porte à croire que Philippe de Croy se borna à remplir l’engagement de sa mère. Les revenus rangés sous le second chef représenteraient donc une valeur de 464 liv. 16 s. 10 d. Quant aux produits annuels de l’obituaire, fondations pieuses, etc., etc., rien jusqu’ici ne permet de les évaluer directement; mais on voit qu’ils devaient s’élever à 2280 liv., si l’on adopte le chiffre -de 300 liv. pour valeur d’une prebende depuis la suppression de 1575

Dépenses : : 12 chanoines à 300 liv. soit 36000 liv.+ charges 600 soit un total de 4280 liv Recettes : dotation 2000 liv Obituaire, etc., etc . . 2280 liv soit un total de 4280 liv.

Que ces chiffres soient exacts ou non , il est incontestable que le Chapitre de Saint-Nicolas fut toujours besogneux ; c’est un fait qui ressort de tous les documents. En recommandant aux chanoines , dans un mandement du 7 novembre 1608 l’assiduité aux différents offices, Guillaume de Berghes dit en propres termes « d’autant plus qu’ils sont dans l’impossibilité de prendre des vicaires pour les supplier » et plus loin « plus les revenus des prébendes de cette église sont faibles , plus on doit donner de soins à la bonne administration du temporel; il y aurait sans doute avantage à en investir un des confrères. » L’opinion du prélat fut quelquefois mise en pratique, on verra le chanoine Gobled intervenir dans un acte en qualité de • » receveur du Chapitre ». Un autre indice de la gêne du Chapitre et de la nécessité où il s’était trouvé de réduire ses dépenses , c’est qu’au lieu de six enfants de chœur, , que lui imposait l’acte de fondation, il n’en avait alors que quatre. Mgr. de Cambrai ordonna d’en entretenir deux de plus sur des fonds légués dans cette intention par un Prévôt, dont le nom n’est pas indiqué; Ce mandement du 7 novembre 1608, qui suivit une visite du Chapitre faits par un délégué de l’archevêque le 4 août de la même année a tout le caractère d’un rappel à l’observation des statuts de 1534, auxquels il ajoute de nouvelles prescriptions, telles que l’obligation de porter constamment le costume ecclésiastique, la nécessite de recourir à l’autorité épiscopale pour réduire les anciennes fondations , même dans le cas où la rétribution ne répondrait plus aux charges, enfin, conformément une décision du Concile de Trente, l’injonction de convertir le tiers des fruits de chaque prébende en distributions quotidiennes, affectées aux trois grandes heures du jour, et qui seraient acquises aux chanoines présents à l’office, tandis que les parts des absents profiteraient à la fabrique.

Francois Vander Burch visita en personne le Chapitre d’Avesnes, les 13 et 14 février de l’année 1617. Le 15, avant de quitter la ville, il adressa aux chanoines un mandement dans lequel il recommanda l’observation rigoureuse de toutes les prescriptions de son prédécesseur, et prononça sur quelques points qui n’offrent plus actuellement aucun intérêt. Le but principal de cette visite solennelle parait avoir été le rétablissement de la bonne harmonie entre le Chapitre et le curé. Les deux parties signèrent alors un traité de paix dont les principales dispositions méritent d’être reproduites  » Les deux parties se pardonnent et oublient mutuellement le passé; désormais elles vivront dans une sincère amitié, et s’aideront l’une l’autre de tout leur pouvoir. Les ornements du Chapitre et ceux de la paroisse serviront indistinctement aux deux parties contractantes. Le bâtonnier du Chapitre prêtera ses services au curé, le clerc du curé fera de même à l’égard du Chapitre. Le Chapitre et le curé n’auront qu’un seul et même maitre de chant. L’été prochain , le Chapitre fera restaurer convenablement le chœur; le curé facilitera cette opération de tout son pouvoir, en sollicitant des subsides du prince de Chimai , de l’Abbé de Liessies, du magistrat et de la ville d’Avesnes, et en faisant également des démarches auprès du clergé de Hainaut à l’effet d’obtenir remise des tailles dues par le Chapitre. • Jusqu’à l’achèvement des travaux , le curé sera dispensé d’assister aux heures canoniales; une fois la restauration terminée , il prendra part aux offices canoniaux, autant qu’il le pourra, ce qui sera laissé à l’appréciation de sa conscience; néanmoins sa présence sera indispensable pour lui donner droit aux distributions des obits et des anniversaires, à moins d’un empêchement résultant de ses fonctions, et signifié au Notateur ». Le curé de Saint-Nicolas, qui signa « ces conditions de pair et de concorde proposées par Mgr. Vender Burch. » se nommait Nicolas Warnot,il ajoutait à son titre celui de Doyen de chrétienté.

A partir du Traite des Pyrénées (1659), le roi do France nomma aux prébendes.  » Messieurs du Chapitre royal  » continuèrent de jouir d’une assez haute considération mais de maigres prébendes. Des pièces officielles de 1723 et 1725 apprennent que  » Sa Majesté leur faisait remettre annuellement, pour satisfaire aux payements des droits du domaine, une somme de 654 liv, sur laquelle il leur restait du bénéfice ».

Quelques bonis, du reste, leur venaient parfaitement à point pour soutenir, comme demandeurs ou défendeurs, les nombreux procès dont on trouve partout des traces. Des extraits d’une sentence rendue, le 9 août 1737, par la cour de l’officialité de Cam brai , montreront que l’abondance ne régnait pas à cette époque, dans la collegiale de Saint-Nicolas d’Avesnes, et que le traité de paix de 1617 n’avait pas définitivement banni de son sein les conflits d’attributions.

Et faisant droit sur le deuxième chef des conclusions prises par le demandeur (le Vice-Promoteur), nous ordonnons aux défendeurs (les chanoines d’Avesnes) de faire accomplir par les chanoines de leur église les quatre semaines de résidence périlleuse portées par leurs statuts, leur faisant défense de les dispenser à prix d’argent; etc, etc.

Et en tant que touche, le troisième chef des conclusions du dit Vice.Promoteur, nous, sans s’arrêter (sic) à la prétendue transaction faire à Maubeuge le11 février 1711, entre le sieur Boniface se disant authorisé du corps du Chapitre d’une part , et le sieur Lecompte, curé d’Avesnes d’autre part, et à l’intervention de feu monsieur Doujat, intendant du Haynaut, ordonnons que les Te Deum, qui seront chantés solennellement, seront entonnés par le curé dudit Avesnes, faisons défenses au dit Chapitre de le troubler en ce regard à peine d’animadversion.

Malgré son zèle incontesté, le Chapitre d’Avesnes ne fut guère en mesure d’orner splendidement l’église de Saint-Nicolas; et ce dut être pour les chanoines un grand sujet de joie, quand parfois des fidèles songèrent à ajouter aux objets strictement nécessaires pour célébrer les offices avec décence.

Par un testament authentique du 26 mai 1699, le doyen Antoine de Bonifacii légua à la chapelle de Saint•Antoine une somme de cinq cents écus, payable dix ans après sa mort et affectée à ]’acquisition de quatre chandeliers d•argent, d’une croix et d’un crucifix de même métal. Le legs fut-il délivré ? Reçut-il la destination indiquée par le testateur? C’est ce qu’il n’est pas facile de décoder quand on lit une dépêche asses curieuse, qui peut naturellement trouver place ici. En écrivant à ]’intendant du Hainaut, le 23 février 1759 ou 60, au moment où la guerre de Sept ans avait mis les finances de la France dans le plus triste état, le subdélégué d’Avesnes rappelle d’abord qu’il ne se trouve dans l’étendue de sa subdélégation aucune abbaye ou communauté religieuse, hors celle des Récollets; puis, après avoir parlé avec peu de bienveillance de la Maison de Liessies, il continue en ces termes  » Le Chapitre d’Avesnes est aussi pauvre en argenterie qu’en biens : grâces a son zèle, le service divin cesserait. Nous n’avons que la chapelle sous l’invocation de Saint Nicolas qui ait de l’argenterie, qui consiste en quatre grands chandeliers hauts de deux pieds, qui , dans les fêtes solennelles, servent au chœur où il n’y en a point, et trois effigies de saints, l’une de Saint- Nicolas, l’autre de Saint-Jean, et l’autre de Saint-Sébastien; . toutes trois hautes d’un pied et plus, sans y comprendre la sou-base en bois, où il y a quelques reliques ; . administrateurs de cette chapelle, ceux des autres ainsi que le Chapitre et le magistrat, à cause de la paroisse, ont envoyé, il y a plus de six semaines, à Mgr. l’archevêque de Cambrai , un état détaillé de leur argenterie, sur lequel le prélat n’a pas encore jugé à propos de faire connaitre ses intentions « .

A l’égard des particuliers, M. d’Hugemont et Mme de Dourlers étaient les seuls qui eussent de la vaisselle plate; l’un et l’autre • en ont fait le sacrifice; le premier surtout avec la démonstration d’un sujet véritablement attaché à son roy. Les autres particuliers de notre ville n’ont que des pièces de vaisselle, qui semblent nécessaires ou du moins convenir à leur état : couverts , flambeaux, cafetières, etc. etc. Je sens bien que la plupart et peut-être tous pourraient s’en passer : que leurs pères plus simples, plus modestes, et plus économes s’en passaient : que des citoyens bien zélés s’en dépouilleraient avec autant de plaisir que les dames romaines se privèrent de tout ce qui les ornait, dans les temps de crise où se trouva la République; mais les vertus autant politiques que morales ne sont plus guère de notre siècle. Si . vous desirez, Monseigneur, avoir les noms de nos bourgeois aisés, je me ferai un devoir de vous en adresser la liste « .

S’il faut en croire un renseignement laissé par un grand-vicaire du Chapitre, le roi , en 1768, réunit la douzième prébende à la Prévôté. Cette mesure améliora la position du prévôt, sans rien changer à celle des autres chanoines. Heureux ceux d’entre eux qui cumulaient alors avec leur canonicat, les fonctions de chapelains ou de vicaires de la paroisse, ou une régence au college royal de la ville. Car à partir de 1760 commença une période extrêmement critique pour l’établissement fondé par Louise d’Albret.

1. Embarras à l’occasion de la taille du clergé de Mons, affaire antérieure au 19 janvier 1765, mais dont on ne peut que donner l’indication, faute de documents; —2 Urgence de rebâtir un des deux moulins de Felleries, (reconstruction autorisée par un arrêt du conseil du 4 septembre 1770, et qui coûta 11,790 liv. de France); —3. Nécessité de consacrer une somme de neuf mille quatre cents cinquante livres en réparations dans les maisons capitulaires, s’il faut prendre à la lettre un procès-verbal d’estimation du 9 avril 1771, signé Blaugie, entrepreneur des fortifications de la villee d’Avesnes, et Gabled, chanoine, receveur du Chapitre; —4. Enfin, et ce fut la grosse affaire, menace dune ruine prochaine par suite de remplois irréguliers de capitaux provenant de remboursements d’anciennes rentes.

Partageant une erreur commune à presque tous les gens de main-morte des provinces du Nord, le Chapitre d’Avesnes avait, postérieurement à la déclaration du 9 juillet 1738 et à l’édit du mois d’août 1749, remployé sur particuliers les capitaux deniers des rentes anciennes qui lui avaient été remboursées. Deux débiteurs arguant ces reconstitutions de nullité , et prétendant en conséquence imputer sur le prix principal les payements des arrérages obtinrent gain de cause devant le parlement de Flandre (arrêts des 16 mars 1764 et 9 juillet 7769). Menacés de voir ainsi s’anéantir la meilleure part de leurs revenus, les chanoines de Saint-Nicolas ne cessèrent d’adresser requête sur requête au conseil, sollicitant surtout 1) Des lettres-patentes confirmatives de toutes les reconstitutions de rentes faits à leur profit depuis le 9 juillet 1735; 2) L’autorisation d’acquérir, au village de Felleries, le tiers de deux moulins, de deux étangs et de quatre rasières de pré, y attenantes, dont les deux autres tiers leur appartenaient déjà par indivis. Cette acquisition, vu l’extrême difficulté qui existait pour eux d’acheter des rentes de la nature de celles qui permettaient les ordonnances, était le seul moyen d’employer utilement les capitaux à eux appartenant, qui se trouvaient ou se trouveraient ultérieurement nantis entre les mains des dépositaires publics, où ils restaient improductifs. Après use minutieuse information , une décision du 3 mai 1774 accorda le second chef de demande et rejeta le premier. Les particuliers qui avaient souscrit les nouvelles reconstitutions ne se prévalurent sans doute pas tous de leur, au mépris de requête; mais, malgré le défaut de renseignements à cet égard , on croit être dans le vrai en disant qu’il résulta de cette affaire une diminution notable des ressources du Chapitre.

On peut voir une conséquence de cet état de choses dans un ou du moins dans un commencement de procès entre les chanoines qui s’étaient partagés en deux camps. Avant de faire connaitre le peu qu’on sait de cette affaire, il est indispensable de signaler deux faits nouveaux qu’elle révélè. II paraitrait que depuis assez longtemps la fabrique percevait: 1) les émoluments de la première année des nouveaux titulaires, et 2., par une interprétation fort large de la sentence de 1575, les fruits de la treizième prébende, déduction faite des douze florins attribués au Doyen. Or le Chapitre avait puisé dans la caisse de la fabrique pour solder des frais de procès, ainsi que les réparations du moulin de Felleries. Les chanoines nommés depuis la consommation de ces faits attaquaient les anciens, leurs confrères, en répétition, alléguant , entre autres raisons, que le revenu de la fabrique consistant principalement dans les fruits de la treizième prébende, on n’avait pu lui demander, en aucun temps, au-delà du treizième des dépenses communes à toutes les prébendes. Ce procès, extrêmement compliqué, fut vraisemblablement arrangé; autrement , par les frais considérables qu’il eût entrainés, il aurait hâté la ruine d’un établissement qui n’a laissé que de bons souvenirs, et dans lequel les fils des familles aisées de la bourgeoisie trouvaient une position considérée, et les prêtres âgés une retraite honorable.

Sources : lettre apostolique de Clément VII 1533 – Déclaration de Louise d’Albret 1534 10 avril-Statuts du Chapitre d’Avesnes 1534- Documents et renseignements divers réunis par M Michaux ainé

Biens du chapitre

(Notes et documents 16 18 s Dr G Pierart J Peter) 

A Avesnes, le Chapitre possédait quelques biens consistant en maisons, terres ou rentes, et rapportant au total, en 1519, 33 livres 13 sous. II avaIt aussi d’autres propriétés ou rentes à Avesnelles, Flaumont-Waudrechies, Felleries, Beugnies, Sémeries, Dimont, Dimechaux, Bruyères, Dourlers, Saint-Aubin, Pont-sur-Sambre, Berlaimont, Saint-Hilaire, Fissiau, Taisnieres, Noyelles, Fayt-la Ville et Fayt-le Château, Cartignies, Boulogne, Etroeungt-la-Chaussée, Ramousies, Floyon, Beaurieux, Dompierre, Limont-Fontaine, Maroilles, Féron, Marbaix. A Landrecies, ils avaient un revenu de 124 mencauds et 3 pintes de blé. Par cette longue énumération, ne concluons pas cependant que le Chapitre est riche • son revenu annuel tout entier n’est alors que de 334 livres, 3 sous et 8 deniers, somme qu’il faut partager entre les douze chanoines. Le traitement de chacun de ceux-ci est donc bien modeste (comptes de 1519,de 1542, de 1549).

Pour expliquer cette insuffisance, il faut se rappeler que Louise d’Albret est morte avant d’avoir eu le temps de constituer pour le chapitre une dot suffisante, c’est à dire avant d’avoir parachevé son œuvre (Registre Collégiale f° 68 Chapitre au Trésorier de sa Majesté 21 avril 1636).

Cette médiocrité si elle est sensible dans les années ordinaires, devient désastreuse lorsque la guerre sévit et que le pays est ravagé.

Pendant la guerre de Trente ans, les biens du Chapitre sont dévastés régulièrement chaque année, de 1636 à 1645, et les chanoines avouent être incapables de payer la contribution volontaire demandée par le gouverneur espagnol d’Avesnes, Castel Rodrigo : « Nous n’avons profité d’une maille de notre prébende, n’ayant seulement reçu pour payer les serviteurs de l’église, luminaire, etc … le principal bien (Landrecies) de notre petit Chapitre est occupé par l’ennemi depuis 1637 (Registre Collégiale f° 80 Chapitre à l’Archevêque de Cambrai).» En 1649, la guerre sévissant toujours et les biens situés « es frontières » ayant encore été ravagés, chacun des chanoines ne reçut comme traitement pour l’année entière que sept ou huit rasières de blé, sans aucun argent (ibid, f° 8521). La médiocrité financière du Chapitre est donc irrémédiable : dès l’origine, ses revenus sont insuffisants. Avec les années, l’argent perdant toujours de sa valeur, elle devient pauvreté.

En 1729, les chanoines demandent à l’archevêque de Cambrai de réduire leur nombre à huit « attendu la modicité de leurs revenus » (ibid, f° 220, 26 septembre 1729). Ils avaient alors 8 deniers du Hainaut par jour, soit un peu plus d’un demi sou par jour pour chacun (ibid, f° 376) Souvent même cette modique somme ne leur était pas allouée : il suffisait d’un procès à soutenir ou de réparations à faire faire au chœur de l’église, par exemple, pour que le montant des prébendes fût absorbé tout entier et les chanoines privés de tout secours ( ibid, f )43).

En 1739, un nouveau règlement de perception et de répartition permit d’assigner à chaque chanoine un revenu journalier de 3 sous (R C, f° 370), mais cette amélioration fut jugée encore insuffisante car le Chapitre envoya un de ses membres à Paris, le 11 janvier 1758, « pour représenter la modicité de ses revenus », en lui laissant pleins pouvoirs pour les démarches à faire (ibid, f° 317). C’est seulement le 1″ octobre 1765 que l’archevêque de Cambrai consentit à supprimer une prébende et le Chapitre continuera de réclamer la suppression des trois autres, à mesure que les vacances se présenteront (ibid, f° 341.).

Au total, le chanoine est pauvre parce que sa prébende est insuffisante. Il est aussi mal logé. En principe, le chanoine dernier arrivé au Chapitre prend le logement le plus modeste. Au décès de l’un de ses confrères, il peut espérer
être logé un peu mieux, car le plus ancien a le droit de choisir la maison du défunt en cédant la sienne à son suivant (ibid, f 131, f° 32 et 33).

En 1772, le 26 juin, deux chanoines déménagent pour s’installer de façon plus confortable, « les nouvelles maisons étant beaucoup plus logeables, chacune ayant une cuisine et une chambre au-dessus » (R C, f 382). Avec une cuisine et une chambre au-dessus, les chanoines, on le voit, n’avaient aucune prétention à une installation luxueuse La plupart des maisons canoniales devaient se trouver derrière l’église : il est fait mention en 1650, d’une « petite maison contiguë au cimetière.. avec issue sur le dit cimetière pour aller à la rue derrière le chœur de l’église collégiale » (ibid, Chapitre au baron de Crèvecoeur, f ° 98).

Cette pauvreté des chanoines, qui s’aggrave à mesure que l’argent diminue de valeur, est donc plus particulièrement sensible au XVIII e siècle En 1766, le revenu de chacun d’eux n’atteint pas 300 livres, et à cette époque, ils ne sont plus que onze (Ch p 13, note 3) On comprend qu’un certain nombre d’entre eux sortent du Chapitre pour entrer dans le clergé paroissial. Le prévôt Grâce, devient ainsi curé de Glageon en 1750 et il est imité par plusieurs de ses collègues qui vont desservir des paroisses aux environs (R C, passim).

Ce qui rend surtout pénible la situation financière du Chapitre, ce sont les charges nombreuses auxquelles il doit subvenir avec ses petits revenus. Non seulement il devait payer les serviteurs de ses offices et les enfants de chœur,
mais il avait aussi à fournir et a entretenir les ornements sacerdotaux, le mobilier d’église et de sacristie, les objets du culte, acheter les cires, etc…. ; il devait payer le receveur de ses revenus, ses commissionnaires (compte de 1519).

De par ses statuts, il était tenu aussi de faire une distribution aux pauvres de la ville, le premier dimanche de chaque mois, après l’office ( R C, f » 31, Advertance au chapitre, 26 octobre 1616.). Il soldait en outre au seigneur d’Avesnes et aux seigneurs des enviions les tailles qui pesaient sur ses terres (C C, compte de 1510). C’était aussi à lui que revenait la charge entretenir le chœur de l’église : cf le paragraphe consacré à la restauration du chœur en 1617.

Les derniers chanoines

Notes sur les derniers Chanoines du chapitre Saint-Nicolas d’Avesnes

D’après le calendrier général de la Flandre, du Hainaut et du Cambrésis pour l’année 1787» (voir page 400) le chapitre St Nicolas d’Avesnes comptait à cette époque les douze chanoines dont les noms suivent : de Beaumont, prévôt ; Christophe, doyen ; Jean, curé de la paroisse ; Gobled, écolâtre ; Hauttecoeur, grand chantre ; Rossignol, second chantre et maître de musique , Jespart, Moisez, Nicolas, Dubucquoy, Toilier et Desenfant. Ce dernier est mentionné comme absent. A la fin de 1790, nous retrouvons neuf des chanoines déjà cités ; mais trois noms manquent, ceux de Christophe, de Toilier et de Desenfant. Christophe était mort en 1788, la chose est certaine. Quant à Toilier et Desenfant, peut-être aussi étaient-ils morts à cette époque ; la chose paraît assez probable, nous n’en avons cependant pas de preuve absolue. Si trois chanoines ont disparu de la liste du chapitre depuis la fin de 1786, en revanche nous trouvons, à la fin de 1790, le nom de deux nouveaux chanoines ; Bultot et Gahsset, de sorte qu’à ce moment le chapitre St Nicolas d’Avesnes comprend un
prévôt, un chanoine curé et neuf chanoines, soit au total onze membres Voici les détails que nous avons pu recueillir jusqu’ici sur ces onze chanoines. Ils auraient à coup sûr besoin d’être complétés en plus d’un point ; mais nous avons conscience de n’avoir rien avancé que de certain ; du moins, nous y sommes-nous efforcé.

Le prévôt du chapitre, Michel DE BEAUMONT (ou Debeaumont) était né à Eclaibes en 1715, puisque le 11 janvier 1791 il est indiqué comme âgé de 75 ans — chanoine depuis 1752, prévôt depuis 1782, il prêta le serment de fidélité à la Constitution civile du clergé On le retrouve encore à Avesnes dans le courant de 1793, et; il est signalé alors comme vicaire du curé constitutionnel Jean. Nous ignorons où et quand il mourut.

HAUTCOEUR (ou Hauttecoeur) Bon-Pierre devient chanoine en 1760 ; et, doyen du chapitre, en 1788, succédant en cette qualité à Christophe dont il a été parlé plus haut. Il était âgé de 57 ans au début de 1791 II est tout à fait certain qu’il prêta le serment de fidélité à la Constitution civile du clergé , mais, il est certain aussi qu’il en éprouva promptement du regret (lettre de Targne ex- vicaire de Floyon, en date du 12 décembre 1801 à M. Godefroy, disant qu’au commencement de 1792 il fut chargé de relever M. Hautcoeur duquel aucune rétractation publique ne fut exigée). Après le Concordat, on trouve Bon- Pierre Hautcoeur, en qualité de prêtre habitué à Avesnes. Il mourut le 15 mars 1814.

JEAN (Pierre-François) était chanoine et curé de St Nicolas depuis 1781. Il prêta le serment de fidélité à la Constitution civile, demeura curé constitutionnel d’Avesnes et « abdiqua » en germinal an 2 Dans une note de ses « Promenades dans l’arrondissement d’Avesnes », tome 2, p. 46, M » 8 Clément Hémery reproduit la note suivante à son sujet : « Le pasteur (elle ne le nomme pas ; mais c’est manifestement de lui qu’il s’agit) avait quitté son troupeau sans scandale ; une vocation incertaine eut ce résultat presque sans conséquence, dans ces jours de doutes et d’erreurs .»

GOBLED (Jean-Baptiste), âgé de 71 ans au début de 1791 était chanoine depuis 1748 ; il était écolâtre. Lui aussi prêta le serment de fidélité à la Constitution civile. On le trouve encore à Avesnes en 1792 et au début de 1793. Il mourut soit à la fin de 1793, soit au début de 1794.

ROSSIGNOL (César-Joseph) devint chanoine de St Nicolas d’Avesnes en 1764. Api es avoir prêté le serment de fidélité à la Constitution civile, il demeura à Avesnes ; il y remplit vers la fin de la Révolution les fonctions de curé constitutionnel. On l’y trouve encore en 1801. Un poste de vicaire à Avesnes lui fut offert en 1803, poste qu’il n’accepta pas.

JESPART (Philippe-Joseph), né à Avesnes le 16 mai 1742 devint chanoine en 1768. Il prêta le serment de fidélité à la Constitution civile le 30 janvier 1791, afin, dit-il plus tard, de pouvoir se livrer à l’instruction de la jeunesse.
Il se rétracta dans le courant de l’année 1801. Vicaire d’ Avesnes en 1808, il mourut aumônier de l’hospice civil de cette ville le 30 juin 1820.

MOISEZ ou Moiset (Jacques-Joseph) naquit à Avesnes le 31 décembre 1750. Il devint chanoine en 1777 ; après avoir prêté serment de fidélité à la Constitution civile, il demeura à Avesnes, y fut un temps officier municipal, « abdiqua », je pense, comme Jean ; mais le 16 décembre 1801 se rétracta publiquement « avec éclat et larmes abondantes » (lettre de Piton, futur doyen d’Arleux, alors « missionnaire diocésain » dans la région, à Godefroy) Curé de Sémeries le 24 octobre 1802, il mourut le 25 juillet 1818.

NICOLAS (François-Toussaint), chanoine depuis 1782, avait 61 ans au début de 1791. Il prêta le serment de fidélité à la Constitution civile ; et fut nommé curé constitutionnel de Trélon. Il ne semble pas qu’il ait mis grande diligence à gagner ce poste, car une lettre du procureur- syndic du district d’Avesnes, du 4 janvier 1792 interdit de le payer jusqu’à ce qu’il se soit rendue à son poste. Il
finit pourtant par s’y rendre ; et on l’y trouve encore en 1801 Désigné après le Concordat pour la cure de Solre-libre (Solre-le-Château), il mourut presque aussitôt (fin de 1802 — sans doute le 10 novembre 1802). Nicolas était avant la Révolution principal du collège royal d’Avesnes.

DUBUCQUOY (Charles-François-Joseph, né à Saint-Rémy-Chaussée le 26 mars 1755 devint chanoine d’Avesnes en 1782. Je pense qu’il prêta le serment de fidélité à la Constitution civile ; mais, par la suite, il émigra dans le Hainaut. Après le Concordat, on le retrouve curé d’Englefontaine, puis en 1807, doyen de Landrecies ; et, enfin, en 1819, curé-doyen de St-Christophe à Tourcoing. C’est dans cette dernière ville qu’il mourut le 28 janvier 1828.

BULTOT (Philippe-Noël-Marie) naquit à Avesnes le25 décembre 1757 Le « Calendrier général du gouvernement de Flandre », etc pour 1787, le signale comme grand clerc à la paroisse d’Avesnes En 1787 il est chanoine Le 30 janvier 1791 il prête le serment de fidélité à la Constitution civile. L’année suivante, il quitte la France pour se réfugier à Mons. On le trouve vicaire à Dour en 1794. Après le Concordat, il devient curé de Dompierre où il meurt le 3 mai 1828.

GALISSET (Charles-Louis), né à Avesnes en 1762 ordonné prêtre en 1786, devint chanoine en 1788 II exerçait en 1790 les fonctions de professeur de rhétorique au collège royal d’Avesnes. Prêta-t-il le serment de fidélité à la Constitution ? La chose n’est pas certaine ; toujours est-il qu’il émigra bientôt. Une lettre de la municipalité d’Avesnes, en date du 18 décembre 1792, au procureur-syndic Groslevin le met « au nombre de ceux qui sont sortis de la République ». Après le Concordat il devint, de 1802 à 1832, curé de St Aubin. Il mourut le 9 juillet 1832.

MAURICE CHARTIER.
Professeur au Grand Séminaire
de Cambrai.

L'église actuelle en photos
Le Chœur
Les sièges des stalles
Tapisserie
Le Chœur

Le chœur, en briques et pierre est la partie la plus ancienne de l’édifice. Il est du XIII e siècle. Il est formé d’une abside polygonale à cinq pans, plus basse que la nef. Le pavement du chœur eut lieu en 1851 (ADN Série 4 V).

La Nef

Celle-ci a une gracieuse légèreté et une harmonie qui font du bâtiment un exemple unique en son genre de l’architecture religieuse du XVI e siècle.

La grande Chapelle de la Vierge
Triptyque : à gauche l’Annonciation, au centre l’Assomption et à droite la Visitation

Ce merveilleux triptyque date de 1541 et est composé de quatre volets peints sur chaque face, et qui pivotent de chaque côté d’un panneau central aujourd’hui disparu. Il représente des scènes de vie de Saint Sébastien que l’on invoquait autrefois contre la peste.

Watteau exprime ici l’élan ascensionnel et démontre toute sa maîtrise technique dans un style typique du baroque tardif. Watteau acheva le cycle en 1768 et les toiles sont restées en place dans leur cadre d’origine depuis le XVIIIe, ce qui les rend d’autant plus rares et précieuses.

L’orgue construit par Victor Gonzalez dans ses ateliers en 1958, installé dans la Collégiale d’Avesnes-sur-Helpe en 1964 par Jean-Marc Cicchero.
Dalle funéraire d’Adrien de Blois mort en 1561 et de sa femme Jeanne Lallaing.

Sous la tribune d’orgues, figure la pierre tombales d’Adrien de Blois, bailli de la terre d’Avesnes et gouverneur de la ville de 1544 à 1555. Il est représenté aux côtés de sa femme. Cette pierre, d’un beau marbre rouge, a été très détériorée dans l’incendie de la tour en 1944.

Dalle
Dalle funéraire symbolisée par « la Grande Faucheuse »

Les chapelles absidiales : en partant du portail à gauche :

Chapelle avec de magnifiques boiseries Louis XV
Confessionnal , contemporain des lambris (1740)
Chapelle Sainte Anne
  • la quatrième Chapelle Sainte-Anne avec retable montrant les premiers signes de l’art baroque, à son sommet une statue de Sainte-Anne du XV ee siècle.
  • La grande chapelle de la Vierge avec ses boiseries exécutées vers 1740 et ses toiles peintes de Louis Joseph Watteau représentant l’Annonciation, la Visitation et au centre l’Assomption.

à droite :

Chapelle Saint Antoine : toile représentant Saint-François d’Assise au désert (XVIII e siècle) et statue de Saint Antoine.
Chapelle Saint Nicolas : au sommet Dieu le Père. Les grandes toiles sont aussi de Louis Watteau :saint Jean Baptiste baptisant, saint Nicolas apparaissant aux galériens et apaisant la tempête, saint Sébastien
  • la chapelle Saint-Antoine
  • La grande chapelle Saint-Nicolas
  • La chapelle Notre Dames des Mouches
La chapelle Notre Dame des Mouches. Le tableau représente les Français mis en fuite par des essaims d’abeilles, grâce à l’intervention de la Vierge, en 1498.

La légende des mouches :

En 1498, alors que le Hainaut appartient aux Pays-Bas, les armées françaises assiègent Avesnes, place forte de première importance. Le 21 novembre, jour de la présentation, les paroissiens réunis en grand nombre dans l’Eglise prient la Sainte Vierge avec ferveur pour la délivrance de leur ville.

C’est alors que les abeilles du château fort d’Avesnes, troublées par la mitraille, sortent de leurs ruches et forment un rempart en face de l’ennemi qui se disperse en toute hâte. C’est pourquoi, dans les armes d’Avesnes, figurent une ruche et neuf abeilles.

La Chaire
Fonts Baptismaux
Vitrail

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La collégiale Saint-Nicolas d’Avesnes-sur-Helpe a été victime d’un incendie le lundi 5 avril 2021. On déplore la destruction par les flammes du retable situé dans la chapelle sud, retable qui abritait 3 tableaux réalisés en 1768 par Louis Watteau, classés Monuments Historiques en 1913, en même temps que la collégiale elle même. Afin d’accompagner et soutenir la commune d’Avesnes sur Helpe, une association locale « Sauvons la Collégiale d’Avesnes » a été créée pour animer l’appel aux dons. Tous peuvent contribuer à cet effort de restauration et de sauvegarde.