L’Avesnois autour de ses légendes

Notre Dame des Mouches

En 1498, alors que le Hainaut appartient aux Pays-Bas, les armées françaises assiègent Avesnes, y pénètrent le jour de la présentation de N.D. au temple (21 novembre), et arrivent au portail de l’église, où les habitants rassemblés, assistent aux matines. Mais, tout à coup, elles s’arrêtent comme frappées d’épouvante, se retirent avec précipitation et s’enfuient en s’entre-tuant. Une délivrance si inespérée fut regardée comme une grâce du ciel, et, dans l’élan d’une pieuse reconnaissance, les imaginations ardentes se sont figuré que la Vierge Marie était apparue aux assaillants, irritée et menaçante, tenant une baguette blanche et leur lançant des essaims d’abeilles.

Centenaire N.D des Mouches. Carte postale vers 1910

Ce miracle a été mentionné dans les registres de la confrérie de N.D. de Bonsecours, folio 22 v°. Il a fait l’objet vers 1780 d’un tableau placé au dessus de l’autel de la 3è des chapelles latérales de droite en la collégiale d’Avesnes et au début des années 1800 d’une première procession au nom de N.D des Mouches.

la Pierre Croûte de Bellignies (l’Autel de Bel)

Ce mégalithe dit de la pierre-croute (petra cryptae : pierre de la grotte) constitué d’un bloc de calcaire de couleur jaunâtre  était initialement dressé  à Houdain-lez-Bavay, sur un coteau percé de grottes non loin de l’entrée d’un souterrain nommé le « Trou des Sarrazins ».

En 1810, Jean-Baptiste Lambiez (1) pratiqua des fouilles au pied du bloc de pierre, y aurait découvert des os et des cornes avant de le faire déplacer dans le parc du château de Bellignies. Doué d’une imagination exaltée, l’ancien prêtre y vu un autel consacré à Bélénos, le dieu solaire des Gaulois et à qui il fallait selon lui attribuer l’origine du village de Bellignies.

Certains préhistoriens ont cru découvrir sur la pierre des gravures cupulaires représentant le soleil et la constellation de la grande Ourse. Ces gravures témoigneraient d’un culte stellaire aujourd’hui oublié.

(1) En religion Père Grégoire, du couvent des Récollets à Givet puis à Lille. Défroqué à la Révolution. « Antiquaire », journaliste et historien à partir de 1790.

Le Bouzouc

Gilles de Chin, premier chambellan des comtes de Hainaut, tua dans les marais de Wasmes, près de Mons, un dragon terrible qui décimait toute la contrée. Cette légende a son explication naturelle. En léguant à l’abbaye de Saint Guislain toute proche une partie du territoire de Wasmes, Gilles fit assécher les marais qui le recouvraient. Or, au moyen âge, la régression des eaux s’expliquait dans la croyance populaire par la destruction d’un dragon, dont l’haleine rendait les lieux insalubres.

Pris de passion pour cette légende, un Berlaimontois, Louis Debionne créa en 1923 de toute pièce un dragon qu’il baptisa Bouzouc. Chaque année, la commune organise un cortège où l’on promène le fameux dragon.

Cette fontaine dite « pétrifiante » est du même type que celle de Saint-Alyre, près de Clermont-Ferrand. Ses eaux naturellement saturées en carbonate de chaux ont la propriété de donner l’apparence de la pierre aux objets qui y sont déposés.

Elle se trouve au sommet d’une colline boisée, nommée Bois de Squinchaux, et se jette dans la Hante, à quelques centaines de mètres de sa source.

La Fontaine St Etton Rue de la Brasserie

Au VII e siècle, un religieux irlandais, Etton, vint s’établir à Fuchaux, au bord de la chaussée romaine, en un lieu appelé Villers-en-Thiérache, dont Jovin était le seigneur.

Il se mit à défricher le sol avec quelques disciples, quand Jovin, furieux de se voir dépossédé, accourut et osa porter la main sur Etton. La main demeura attachée au manteau du saint et se dessécha aussitôt. Mais Etton, voulant donner un gage de toute puissance de la prière, délivra par ses oraisons la main sacrilège, et Jovin en recouvra l’usage. En reconnaissance de ce miracle, Jovin mit les religieux en possession des biens qu’il avait.

Un jour, saint Etton trouva endormi dans une prairie un bouvier, muet de naissance, qui se trouvait au milieu de son troupeau. Le saint le toucha de son bâton, et le paysan se mit à parler. Telle est l’origine des baguettes de saint Etton.

La fontaine qui se trouve à quelques mètres au delà de l’église est ornée de la statut du saint. C’est là que, selon la tradition, Jovin fut baptisé après sa conversion.

Le jour de l’Ascension, un grand nombre de pèlerins viennent tremper une baguette de coudrier dans cette fontaine miraculeuse avant de la faire bénir par le prêtre. Une fois à leur maison, ils frottaient la baguette sur l’échine des vaches : et c’était une superbe production laitière assurée pour l’année. Si de mauvaises langues appellent saint Etton saint Teton ne les croyez pas !

La fontaine saint Georges

La légende veut que des Anglais traversant autrefois la région et tourmentés par la soif prièrent leur patron saint Georges. celui-ci leur aurait apparu; son cheval aurait frappé le sol de son sabot, et la source aurait jailli à l’instant même. Les eaux miraculeuses attiraient encore au milieu du XX e siècle de nombreux pèlerins car elles soignaient les maladies de peau et les problèmes oculaires.

Un petit homme rouge

Il était courant de rencontrer le soir dans la forêt un petit homme ventru, vêtu d’un costume rouge pas plus haut qu’une botte de cavalier. Il était redouté pour infliger des punitions.

Un petit dragon rouge

Un petit dragon rouge errait parmi les elfes et autres lutins dans la forêt de Mormal, mais contrairement à ses pairs, il ne crachait pas du feu, mais… de l’eau.

Le tombeau de Gargantua ?

D’après la légende, le célèbre géant Gargantua, décrit par Rabelais au XVIe siècle, ogre né de l’oreille de sa mère, serait enterré dans la forêt, au lieu dit « Morgnies » à la sortie de Locquignol. En réalité ce qui est considéré comme sa tombe est un tumulus du VIIe siècle avant JC.

La légende du Sarrazin

Un riche Sarrazin vivant dans la région voulait épouser la fille d’un fermier. Celle-ci, opposée à cette union, demanda au Sarrazin de rechercher une source que jamais personne n’avait pu localiser. Déterminé, le Sarrazin trouva la source mais la jeune fille prise de panique, fit reboucher le trou, provoquant la colère de son prétendant qui repartit chez lui.

La légende raconte alors que s quelques années plus tard, les enfants de cette jeune fille partis cueillir des champignons furent soudainement engloutis dans le sol à l’endroit même de la source du Sarrazin.

Des fontaines aux diverses vertus

La fontaine de Malgueule avait pour renommée de soigner les douleurs tandis que la fontaine Guyot celle de guérir les maladies des yeux. Quant au point d’eau dit de La flaquette où une chapelle a été érigée elle avait pour vertu de soigner les rhumatismes.

Source principale :  « Histoire, contes et légendes de la forêt de Mormal ». Christian Andréaz

Le Quesne au leu

Le lieu-dit le Quesne est une clairière située dans la forêt de Mormal non loin d’Audignies. Sa légende remonte à la fin du Moyen-âge où les loups (ou leu) y étaient présents. Les bergers se plaignaient de leurs attaques, et les chasseurs posaient des pièges dans le but de les tuer.

Une vieille femme vivait en ermite dans cette clairière, à l’ombre de chênes centenaires. Seuls les loups acceptaient sa présence et cela faisait bien sûr jaser les villageois qui lui prêtaient des pouvoirs de sorcière.

Un soir d’automne, elle vit devant sa cabane un grand loup mâle gris qui lui demanda de l’aide. Elle le suivit sans crainte et trouva sa femelle, la patte avant broyée par un piège. La vieille dame parvint à la dégager, et la ramena à sa cabane pour la soigner. Malheureusement, la louve mourut trois jours après. Elle l’enterra au pied du grand chêne, à quelques mètres à peine de sa cabane. Le grand mâle gris ne s’en remit jamais. Il resta couché au pied du vieil arbre, attendant la mort. Sa fidélité et le chagrin l’emportèrent en moins de deux semaines. La bonne vieille l’enterra, en face du premier chêne.

C’est alors qu’un étrange évènement se produisit quelques jours plus tard avec l’entremêlement des hautes branches des deux chênes en un magnifique arc de cercle. Selon la légende, les nuits de pleine lune on pouvait entendre le chant d’amour du grand loup gris à sa femelle.

L’un des deux chênes, âgé de plus de 600 ans, a été déraciné par une tempête à la fin des années 1980. L’amour des deux loups s’est il interrompu pour autant ? Une autre tradition locale veut qu’il y ait eu à cet endroit une chasse au loup et une pendaison de celui-ci.

Source : Rêves de plumes

Etang et chapelle Fontenelle

A Fontenelle, village voisin de Floyon, qui vit naitre vers 644 saint Ursmer, qui deviendra évêque-abbé de l’abbaye de Lobbes, se trouve un petit bassin alimenté par le ruisseau issu de la fontaine dite de saint Ursmer. C’est la fontaine miraculeuse qui a donné son nom au village. Elle aurait été sanctifiée par le saint patron de la paroisse, et ses eaux auraient le pouvoir de guérir des fièvres.

Cette fontaine aurait également des vertus sur les enfants rencontrant des difficultés à marcher. Ainsi, vers 1950, on plongeait encore des enfants dans le bassin naturel de la source et si ils y urinaient, c’est qu’ils marcheraient. (1) Les mères et les nourrices plongeaient également du linge dans l’eau pour les passer ensuite sur le corps de l’enfant. Une fois le vœu exaucé, il était d’usage de le jeter ensuite dans la fontaine. Aujourd’hui, ces « loques », petits chaussons, layettes et mouchoirs sont accrochés à la porte de la chapelle. 

Enfin les paysans de tous les environs y venaient aussi en pèlerinage pour préserver leurs blés des mulots.

(1) Légendes et Croyances en Avesnois Bernard Coussée)

C’était au VIII e siècle : Wibert, comte de Poitou, fuyant les persécutions du duc d’Aquitaine se réfugia dans le nord de la Gaule où Pépin le Bref lui accorda certains domaines du fisc royal.

Wibert, s’étant un jour aventuré dans la forêt de la Fagne, tua un sanglier dans la vallée de l’Helpe. Le lieu où tomba l’animal lui plut par son aspect riant; et depuis longtemps animé du désir d’être l’auteur d’une fondation pieuse, il le choisit pour y bâtir un monastère.

Et c’est ainsi que le sanglier tué par le chasseur figurera désormais dans le blason du monastère. Et c’est ainsi que le village fut baptisé par Wibert : Laetitia, la Joie. D’ù la devise que prendront les moines par la suite : Servite Domino in Laetitia, ce qui pourrait s’entendre de deux manières: ou bien Servez le seigneur dans la joie, ou bien Servez le Seigneur à Liessies.

L’histoire de Liessies s’écarte un peu de la légende. Liessies, Laetitia, était sous l’occupation romaine un campement de lètes, ces colons à qui les occupants confiaient des terres à cultiver à charge par eux de les défendre contre les Barbares. Ce sont ces colons qui auraient donné leur nom au village.

L’historien Lenotre a conté cette légende, qui ,a la saveur des Lettres de mon Moulin, et qui est peut-être pour notre région ce qu’est le Curé de Cucugnan pour la Provence.

En ce temps-là, les savants étaient attirés vers l’abbaye de Liessies par sa riche bibliothèque et par le nombre et la beauté de ses manuscrits anciens. L’abbé était admirablement secondé par, une équipe de copistes et d’artistes, parmi lesquels Frère Guillaume, l’un des scribes les plus réputés de son temps. Lorsque Gautier d’Oisy, renouant la tradition familiale fit la guerre aux abbayes afin de les dépouiller de leurs biens, le prévôt d’Avesnes et plusieurs habitants de la ville, qui avaient leur fils ou leur neveu au monastère de Liessies, recueillirent secrètement les manuscrits et les vases sacrés pour les mettre en lieu sûr. Frère Guillaume, le scribe, furieux de se voir dépossédé, fut-ce pour un temps, de ses œuvres, et notamment de ce beau recueil de décrétales, qu’il avait si bien écrit, avec de belles lettrines enluminées, monta dans la tour de l’abbatiale, et jeta par un auvent une pierre qui fracassa le crane d’un Avesnois. Mais en descendant, il fut lui-même blessé à la tête dans la bagarre et peu de temps après il mourut. Le soir de sa mort, lorsque l’abbé se fut retiré dans sa cellule, il versa des larmes abondantes sur la perte de son scribe favori ; mais à sa douleur se mêlait une certaine inquiétude : Frère Guillaume n’avait-il pas commis un meurtre ? Et puis n’avait il pas lui-même, lui l’abbé, contribué à sa damnation ? L’habileté du scribe, le lustre que ses splendides manuscrits répandaient sur le monastère en y attirant un grand nombre de prélats et de savants qui venaient les consulter, tout cela joint à ses exploits trop militaires pour un moine, tout cela avait fini par gâter Frère Guillaume ; la discipline se se relâchait à son endroit ; et l’abbé lui passait bien des choses, sous ce rapport. Il écrivait si bien, et si vite ! L’abbé s’endormit, l’esprit absorbé par ces tristes pensées. Pendant son sommeil, il eut une vision : l’âme de Frère Guillaume quittait la terre pour aller comparaitre devant le Souverain Juge ; elle était accompagnée de son ange gardien, qui ployait sous le poids de nombreux manuscrits écrits par son pupille pendant son passage sur la terre. Et l’âme montait, calme et souriante en jetant des regards de complaisance sur ces chefs-d’œuvre écrits à la gloire de Dieu et qui devaient lui ouvrir le Ciel.

Mais, tout à coup, une grande ombre noire se projeta sur le firmament : l’âme et l’ange aperçurent, s’élevant au-dessus d’eux, Satan portant à la main un immense parchemin qu’il serrait dans sa griffe, en grimaçant. Sur ce rôle, Lucifer avait écrit les innombrables péchés du pauvre scribe : Regarde tes péchés, qui se détachent en lettres flamboyantes sur mon sombre vélin, s’écriait Lucifer. Rappelle-toi : un meurtre… Et puis, tant de manquements à la règle, de distractions à l’office… Tant de péchés d’orgueil. Tant de courses hors de l’enclos du monastère ! Ha ! Ha ! Ha !…

Et tout en montant vers le trône de l’Eternel, Satan déroulait son parchemin. L’âme épouvantée de Frère Guillaume en avait comme un éblouissement d’horreur et d’angoisse. Et le diable ricanait toujours : Ha ! Ha ! Frère Guillaume ! C’est aujourd’hui que je prends ma revanche. Tes décrétales avaient si bien déjoué les pièges que j’avais machinés ! A mon tour de marquer des points… et de gagner la partie !

Cependant, Frère Guillaume est arrivé devant le Souverain Juge. Il s’est prosterné dans l’attente de sa sentence. Une balance d’or, bien équilibrée, se dresse en face du trône de Dieu. Alors commence une lutte épique entre les deux anges, lutte qui fait frémir d’épouvante l’âme du pauvre scribe.

Ecoute, disait Lucifer, le bruit sinistre que font tes péchés, en tombant dans mon plateau… Bing ! Bing ! Bing ! Mon plateau penche…

Père Eternel, répliquait l’ange gardien, laissez-moi jeter dans l’autre plateau tous les mots de tous les manuscrits que ce bon scribe a écrits et enluminé à votre gloire !

Depuis un moment, l’âme suit avec anxiété les oscillations du fléau… Enfin Satan vient de laisser tomber son dernier péché, et l’ange, atterré, reste les mains vides… Déjà Satan victorieux avance ses griffes pour saisir sa proie, lorsque le scribe jette un dernier coup d’œil sur la blanche feuille de vélin que l’ange tient encore à la main, pour s’assurer qu’il ne reste point quelque mot oublié…

Le doigt de l’ange glissa du feuillet qui se retourna, et au verso l’ange et l’âme aperçurent en même temps un mot qui n’avait pu trouver place en bas du recto, un mot qui à lui seul en valait trois : Amen !… Et l’ange lança triomphalement le mot dans son plateau, qui trébucha aussitôt, en faisant remonter celui du diable.

Amen ! dit le Père Eternel. Et tandis que Lucifer disparaissait en grinçant de rage, l’ange et l’âme du Frère Guillaume voyaient s’ouvrir toutes grandes devant eux les portes du Paradis.

Amen ! s’écrit le bon abbé en se réveillant en sursaut. Il est enfin sauvé, mais il m’a fait bien peur !…

Plus tard, Si quelque relâchement se manifestait parmi les scribes du monastère, l’abbé faisait le récit de sa visin… Et l’on voyait bientôt les plumes trotter sur les feuilles, et les belles miniatures apparaitre comme par enchantement.

Telle est cette gracieuse légende, bien consolante pour les artistes. Ils ont souvent bien des péchés sur la conscience. Mis la beauté qu’ils créent n’est elle pas un reflet du Très-Haut, une marque de la grâce divine, qui rachète beaucoup de fautes ? C’est un peu la morale de cette histoire.

Sainte Aldegonde Collection Louvre

Aldegonde, née à Cousolre, de parents issus des rois mérovingiens, était demandée en mariage par un prince anglais nommé Eudon. Mais, voulant se consacrer à Dieu, elle s’enfuit de la maison paternelle. Poursuivie par son prétendant, elle se réfugia dans les fourrés situés au bord de la Sambre, devant l’endroit où s’édifia par la suite la ville de Maubeuge.

Aldegonde épuisée vit jaillir à ses pieds une fontaine qui la désaltéra, et près d’être rejointe par Eudon, elle traversa la Sambre en marchant sur les eaux, soutenue par les anges.

Elle se rendit alors auprès des saints évêques Amand et Aubert qui se trouvaient à Hautmont. Ici, l’Esprit-Saint, sous la forme d’une colombe, lui déposa sur sa tête le voile des vierges qui la consacra à Dieu. ..

Aldegonde demeura sur les lieux de ces miracles et fonda le monastère qui donna naissance à la ville.

Renaut-Folie : Ce dessin est un détail de la maison natale de Gromaire. Centre Pompidou Inventaire AM 1989-601

Renaut-Folie était un domaine allodial qui appartenait à la fin du XII e siècle à Clément Renaut. Tandis que le village de Noyelles avait été donné par Charles le Simple à l’abbaye de Maroilles, la terre de Renaut, seule parmi les autres biens, restait indépendante et lui appartenait en propre. Les moines ne pouvaient manquer de convoiter ce domaine, et ils tentèrent à plusieurs reprises de l’obtenir de Renaut, afin d’y établir un lieu de plaisance.

Mais ni les promesses, ni les menaces ne purent ébranler la résolution du propriétaire, qui entendait rester maitre chez lui, et se riait du courroux des moines.

C’est alors qu’une épidémie emporta tout d’un coup toute la famille de Renaut qui se retrouva seul dans son domaine. Les moines eurent alors beau jeu de le persuader qu’il venait d’être l’objet dune vengeance du ciel.

Et Renaut abattu,, céda gratuitement le manoir à la condition seulement qu’il serait admis à l’abbaye et nourri sa vie durant à la table de l’abbé.

L’abbé qui avait signé le contrat tint ses engagements, mais ses successeurs considérèrent bientôt Renaut comme un intrus, et ne voulurent plus l’admettre que comme un frère servant l’abbaye. Et l’histoire raconte que Renaut subit ce sort là sa vie restante, exposé à toutes les humiliations possibles.

La folie commise par Renaut fit jaser longtemps, et les gens du pays donnèrent au domaine le nom de Renaut-Folie.

Portrait de St Humbert en l’église de Maroilles.

Linières est un hameau de Prisches en direction de Grand Fayt situé à environ 5 km au sud est de Maroilles.

Un souvenir légendaire y reste attaché. La tradition veut que Odran, seigneur de Chimay, donna à l’abbaye de Maroilles, en l’an 670,la ferme de Linières, à la suite des circonstances que voici : chassant un jour dans les environs de l’abbaye, il poursuivit un cerf. L’animal aux abois vint se refugier sous le manteau de saint Humbert, qui était en ce moment-là occupé à essarter dans les bois pour la construction de son monastère de Maroilles. Odran, frappé de l’autorité surnaturelle du saint, qui en imposait aux bêtes sauvages, se hâta de faire donation de ses biens a la nouvelle abbaye.

La ferme de Linières appartient encore aujourd’hui au Centre Communal d’Action Sociale (CCAS) de Prisches.

(1) J’ai démontré que Linières cédé à l’abbaye était non pas ce hameau de Prisches mais un premier habitat à Eppe-Sauvage. Revue 38 Avesnois CHGB

Pierres ovoïdes de Recquignies

Située à 50 m de l’église, on voit au sommet d’un mur une pierre formée de quatre éléments accolés ovoïdes. Cette pierre serait vraisemblablement liée à un culte funéraire celtique ou gaulois puisque selon certains spécialistes, ces pierres ont une analogie avec la pomme de pin, qui avait une signification funéraire. On sait en effet que suivant les mystères d’Eleusis, Déméter s’était servie de la pomme de pin pour descendre aux Enfers à la recherche de sa fille Proserpine.

L’odyssée de la déesse à la recherche de sa fille Proserpine symbolise le rythme cyclique qui fait passer du diurne au nocturne, et vice versa, aussi bien les graines que les saisons de la terre ou le destin des hommes… Elle tient ainsi la première place, lorsque la mort survient, dans l’accomplissement des rites funéraires…Il y a d’autres pierres de ce type dans la région et proviennent souvent du mur des anciens cimetières. Il y en a une au Musée d’Avesnes, copie de celle du cimetière d’Avesnelles qui a disparu (3 éléments), une autre à Ostergnies (2 éléments), une maçonnée dans le mur de fondation du clocher de Bérelles. Il y en avait également une autre à Bavay qui a été perdue.

Ces pierres ont d’ailleurs pu être christianisés par la suite et conserver une signification funéraire puisque l’œuf est en soi un symbole de résurrection. Nos œufs de Pâques n’ont pas d’autres sens.

Ce monolithe se trouve sur la Place du Vieux-Marché. C’est un grès landénien de forme conique de 1.5 m de haut avec un diamètre de 2.80 m à la base et 0.70 m au sommet. Est-il un simple mégalithe, une pierre funéraire, une borne, un pilori, une pierre de fécondité ou une pierre de jeunesse ?

En réalité cette pierre doit sa réputation à la fois à sa forme ovoïdale et à la fois au petit carré de quelques centimètres à son sommet.

Dès lors deux traditions entourent cette curieuse pierre, l’une autour du thème de la fécondité et l’autre autour de la jeunesse.

Sa forme phallique a engendré une première légende folklorique selon laquelle les femmes stériles et celles qui souhaitaient avoir un enfant devaient s’asseoir dessus.(Source : le patrimoine des communes du Nord Flohic Editions).

Le trou carré aurait été taillé pour y placer un drapeau de la jeunesse au temps de la ducasse, et cela dès avant la Révolution. Ce rite initiatique aurait été un marqueur social du passage de l’adolescence à l’âge adulte. “Pour être admis dans la corporation et prendre part aux divertissements publics, chaque adolescent devait uriner au-dessus de la Pierre de Dessus-Bise, dont le nom indique assez la destination.”.(La vie dans le Nord de la France au XVIIIe siècle René Minon page 22 Gallica).

le clocher penché de l’église Saint-Pierre de Solre-le-Château

L’église possède un clocher singulier, énorme, bizarre et qui penche comme la tour de Pise. Ce n’est pas un effet d’optique Deux légendes sont racontées pour le justifier : la légende du diable et la légende des filles de Solre. En réalité, les avis sont partagés suer ce phénomène : défaut de construction – infiltrations d’eau de pluie qui pourrissement les poutres de base. En tout état de cause, il semble que l’architecte se serait suicidé, ce qui laisse apparaître une troisième « légende » : il se serait pendu au clocher.

La légende du diable : L’ édification de la flèche en 1612- 1616, aurait provoqué la colère de Satan qui se serait acharné à la détruire. Il fit lever les vents d’est et de violentes tempêtes s’abattirent sur la ville durant plusieurs semaines. Satan crut qu’il allait à nouveau l’emporter, mais la flèche pencha seulement vers l’Ouest. Dieu permit qu’elle tienne bon !

La légende des filles de Solre-le-Château : Jadis les filles de Solre avaient la réputation d’être dévergondées.; et souvent, quand il leur arrivait de se marier, des marmots les attendaient au portail de l’église en appelant leur mère. Un jour, une véritable pucelle se présenta à l’église pour convoler en justes noces. Le clocher en fut si surpris qu’il se pencha en avant pour mieux voir la mariée passer sous le porche. En châtiment de sa curiosité, Dieu lui aurait infligé ce torticolis à perpétuité !

l’une des pierres Martines début XX e siècle

A 1 kilomètre de Solre-le-Château, en direction de Liessies, à gauche dans une prairie on aperçoit les pierres martines (MH). Elles étaient trois mais ne sont plus que deux aujourd’hui, la troisième ayant été brisée au siècle dernier pour empierrer la route ! On y remarque d’un côté d’une de ces pierres dites de Saint Martin la forme empreinte du derrière d’un « homme de la tête au pied. »

La légende :

On conte que saint Martin, alors qu’il était soldat des légions de l’Empereur romain Constance, s’y arrêta pour se reposer. il se serait appuyé « contre cette pierre et que la chaleur surnaturelle dont son « corps était vivifié, a opéré la fusion dans la partie touchée » (1).La légende s’explique : saint martin fut un grand destructeur de temples païens. Là où il n’y avait que des pierres pour témoigner encore du culte des druides, il en fit des autels du christianisme.

L’histoire :

Les pierres Martines sont géologiquement des grès landéniens. Historiquement ce sont des menhirs; ces monuments druidiques ont conservé leur destination jusqu’à l’époque franque, où ils servaient encore de lieu de rassemblement pour les assemblées du Mallum (2).

Les pierres Martines Crédit photo : Chatsam – Sous licence Creative Commons

On a remarqué qu’elles se trouvent dans un alignement parfait avec le village de Floursies, la pierre de dessus-Bise de Sars-Poteries et la pierre qui Tourne de Sivry, marquant le tracé d’une vieille route gauloise qui de Bavay se dirigeait vers Givet.

(1) Le Menhir de Solre-le-Château Article rédigé par M Léon Desailly Bulletin de la Société préhistorique française  Année 1924.

(2) Mallum : Tribunal de droit commun à l’époque franque et carolingienne.

Le moulin de Reumont, aujourd’hui devenu une propriété privée est accessible par un petit sentier qui remonte la vallée de la Solre. Il fut construit au  XVIème siècle et était alors une forge hydraulique, propriété des moines de Liessies.

Près du moulin se trouvent un très bel étang qui a une bien curieuse histoire. Il parait que les grenouilles n’y coassaient jamais. Les gens du pays disaient que les moines les avaient conjurées car elles troublaient leurs prières. Est-ce à dire que cet étang muet traduisait la paisibilité du lieu ?

II existe à Taisnières une donation dont l’origine est assez curieuse. Un maitre et son valet s’étaient perdus dans la forêt de Sassogne. Mourant de faim, ils entendirent le son d’une cloche, vers laquelle ils s’acheminèrent. Ils arrivèrent à la nuit à Taisnieres, où on leur procura des soins et des aliments.

En reconnaissance de ce bienfait, le maitre, dont la postérité n’a pas conservé le nom, donna à l’église un pré, devenu la « Pâturé d’el Cloque », pour que la cloche libératrice de l’église soit sonnée à « jou fali », c’est à dire à la tombée du jour.

Cette fondation a résisté à la Révolution. Au moyen des locations de la pâture, les sonneries jusque dans les années 1970 se faisaient chaque jour par le clerc de la paroisse, les intentions du donateur continuant de la sorte à être remplies.

Cadastre Villers-Sire-Nicole 1810 ADN P 31 / 792

A Villers-Sire-Nicole, le long de la Trouille, en direction de la frontière belge, on peut apercevoir un petit bois : c’est le lieu-dit de l’Ermitage et voici la légende qui s’y rattache :

Englebert de Grez, seigneur de Rouveroy, venait de prendre femme, lorsqu’il dut partir pour la Croisade, prêchée en Hainaut par le cardinal Piculula, et qui avait pour objet d’aller combattre en Prusse avec les Chevaliers Teutoniques contre les infidèles de la Baltique. Englebert fut fait prisonnier ; et quand il revint au pays six ans plus lard, il apprit que sa femme, le croyant mort, s’était remariée avec un seigneur de la région, le sire d’Harmignies.

Fou de douleur, il décida de vivre désormais solitaire, et alla s’enfermer à l’ermitage que Jacques Rouillie, un vieillard, avait bâti en 1367 dans les bois sur les bords de la Trouille.

L’ermite de Villers, que les gens du pays ne reconnurent point, tant il avait changé, s’acquit une certaine réputation de sage, et s’occupa à étudier les plantes et à tenter de guérir les maladies.

Un jour, il reçut la visite de sa femme qui, malheureuse en ménage, venait demander conseil au solitaire. A peine les époux eurent-ils le temps de se reconnaitre, que le second mari survenait, fou de rage. Les deux hommes s’affrontèrent en un combat singulier, et le sire d’Harmignies fut tué.

Englebert de Grez reprit sa place au manoir de Rouveroy, et fit don à l’ermitage où il avait vécu, de différents biens. L’ermitage de Villers persista jusqu’à la Révolution. On y disait la messe dans une chapelle à présent disparue, et les ermites s’y livraient à l’instruction de la jeunesse. Les bâtiments de l’ermitage forment aujourd’hui une modeste exploitation agricole.

Eglise et Prieuré de Moustier-en-Fagne

Saint Landelin était né au village de Vaux, en Artois, d’une famille issue de la famille des rois francs et avait été par saint Aubert, évêque de Cambrai. Sa jeunesse fut orageuse, et il devint un voleur de grand chemin, remplissant de terreur tout le pays soumis à la juridiction spirituelle du pieux évêque.

La légende conte qu’un jour, un de ses compagnons de rapines étant venu à périr dans une rencontre armée, il vit en songe son âme livrée aux tourments de l’enfer. Plein de frayeur et de repentir, il courut se jeter aux pieds de saint Aubert, lui promettant de faire pénitence.

Il tint parole, et sa réputation de piété et d’austérité devint si grande que le roi Dagobert lui légua les terres de Wallers, Baives et lieux environnants pour y construire un monastère. Le monastère de Wallers n’eut cependant qu’une existence éphémère. Il fut détruit par les Normands, et rétabli au Xe siècle à Moustier.

Rien ne rappelle à Wallers le souvenir du monastère et de son fondateur. Ceci n’a rien d’étonnant car le monastère ne se trouvait pas sur la présente commune de Wallers mais à l’emplacement actuel du prieuré de Moustier. En effet, comme le monastère a d’abord été désigné sous le nom de Wallers, puis de celui de Moustier, on a cru à un déplacement causé par les invasions normandes. Il n’en fut rien et en réalité Wallers était avant le XII e siècle le nom dune grande villa mérovingienne d’où sont issus par scission Baives (centre du domaine foncier de l’abbaye de Lobbes) et Moustier (lieu d’implantation physique du monastère) (1).

(1) Prieuré Saint Dodon Moustier-en-Fagne Site Mairie