I Leurs Origines
I A Les Guerres et la Conquête Française : une situation toute particulière à La Flamengrie
Dès son origine au XII e siècle, La Flamengrie partage les vicissitudes du Comté de Hainaut. Celui-ci, après avoir été uni au comté de Flandre, en est séparé à la mort de Marguerite II de Flandre en 1280. Il passe alors à la maison d’Avesnes puis en 1345 à la maison de Bavière avant de se trouver, par héritage, rattaché au Duché de Bourgogne en 1428. Louis XI tente de le prendre en 1477 à Marie de Bourgogne. Celle-ci, à son décès en 1482, laisse le comté à Maximilien de Habsbourg avec lequel elle s’est mariée en 1477. Les Pays Bas bourguignons sont alors aux mains des Habsbourg d’Autriche et deviennent en 1549, à l’initiative de Charles Quint, les Pays Bas espagnols.
Dès lors, la Couronne d’Espagne et le Royaume de France sont en lutte cessante pour la possession de ce territoire. En 1556, Henri II laisse derrière lui « feux, flammes, fumées et toute calamité de Bavay à Villers Pol ». En 1637, les Français, après la prise de Landrecies pillent et brûlent dans tout le Bavaisis. En 1656, au cours de la guerre de Trente Ans, les troupes de Louis XIV prennent et incendient le Château de Roisin. La Flamengrie fait partie de la baronne de Roisin. Son territoire est limité au nord par celui de Roisin et de Meaurain, à l’est par le bois de la Tour ou du Perchois, au sud et à l’ouest par le bois de Roisin.
En 1678 les conquêtes françaises se matérialisent avec la prise de Maubeuge et de Bavai et débouchent sur le Traité de Nimègue. Le comté de Hainaut est alors coupé. La Flamengrie se trouve rattachée à la France avec la prévôté de Bavay, tandis que Roisin qui appartient à la prévôté de Mons, reste espagnol.
Ici la situation est paradoxale. Les Bois du Perchois et de Roisin restent à l’Espagne bien que le premier soit complètement entouré de terres françaises et le second situé de l’autre côté de La Flamengrie.
Le village de La Flamengrie est de fait isolé du reste de la France et l’ancienne voie romaine Bavay Tournai se voit bientôt délaissée. Cette Chaussée Brunehaut longeant les Bois du Perchois et de Roisin devient alors un lieu de prédilection pour les contrebandiers et les partisans hollandais. Ces derniers, dès le début de la guerre de Succession d’Espagne, en 1702, extorquent périodiquement de l’argent aux habitants du village, les enjoignant de verser des contributions sous peine de pillage ou d’enlèvement.
En janvier 1704, à l’endroit où la route borde les Bois de Roisin une vingtaine d’hommes armés arrêtent même le carrosse de l’Intendant du Hainaut, le marquis de Bernières, et en profitent pour lui dérober les chevaux.
En 1709 la situation s’aggrave encore : après les trois mois de gel et de neige d’un terrible hiver, l’invasion durant l’été des troupes hollandaises provoque l’exode des habitants. La Chapelle de la Cense de la Commanderie y est pillée. En août, deux ingénieurs du Roi y sont enlevés par des cavaliers et emmenés à Mons pour être rançonnés.
Le 11 septembre, non loin de là, dans la plaine de Malplaquet, sur le territoire de Taisnières sur Hon, les troupes néerlandaises et autrichiennes s’opposent à celles de l’armée française et se livrent à la bataille la plus sanglante de cette guerre. Les coalisés subissent d’énormes pertes, les obligeant par la suite à renoncer à envahir la France.
En 1713, le traité d’Utrecht met fin à ce conflit. Il consacre le transfert des Pays-Bas espagnols à l’Autriche et confirme dans l’ensemble, à l’exception de la perte de Tournai, les conquêtes françaises : La Flamengrie reste française.
I B Les fluctuations ultérieures de la frontière
En 1713, Les limites n’ont pas changé avec son tracé toujours aussi tortueux. De plus elles demeurent peu précises sur plusieurs parcelles de terre qui font alors l’objet dès 1720 de litige et de contestation.
Ici mais également ailleurs, le long de cette frontière septentrionale, le traité d’Utrecht laisse en litige le sort de nombreuses terres contestées et de multiples enclavements. Il faut attendre la « Convention entre le Roi et l’Impératrice, reine de Hongrie et de Bohème, concernant les limites des Etats respectifs aux Pays-Bas et les contestations y relatives » de 1769 pour que les gouvernants se préoccupent de simplifier la frontière, las qu’ils étaient des multiples difficultés et litiges accumulés. Cette convention franco-autrichienne vise à supprimer les enclaves par des échanges négociés localement.
Cependant, à La Flamengrie, cette démarche n’est pas un aboutissement : l’Intendant du Hainaut Taboureau Des Réaux se contentant de relever les enclaves et les terres en litiges.
Il faut encore patienter pour que le Traité de limite entre la France et les Pays-Bas Autrichien, signé à Bruxelles le 18 novembre 1779 et ratifié le 29 décembre règle définitivement la situation délicate de la frontière à La Flamengrie. Le contexte est en effet ici épineux.
La France souhaite Roisin et les bois de Roisin et du Perchois, l’état major français voyant d’un mauvais œil l’axe de communication militaire Valenciennes Bavay Maubeuge qui a remplacé l’ancien chemin de Valenciennes à Bavay bordé par un bois étranger (Voir la carte ci dessus et sur le site cultur.gouv). L’Autriche, quant à elle, veut conserver ce village et ses bois car ces derniers sont pour elle les plus importants dans la région.
Un accord est trouvé. La convention signée le 18 novembre 1779 stipule (articles 20 et 21) : « L’Impératrice Reine cède au Roi Très Chrétien 70 bonniers du Bois de Roisin. Ce Démembrement sera pris vers l’extrémité du Bois dans la partie où il longe la Chaussée de Valenciennes à Maubeuge, et commencera à la Cense de la Roince, Jurisdiction de la Flamengrie, d’où il sera tiré une ligne droite parallèlement à la chaussée, jusqu’à l’autre extrémité du même Bois. Sa Majesté Très Chrétienne cède en échange à Sa Majesté Impériale Apostolique 70 bonniers de Terre à prendre dans la partie du Territoire du village de la Flamengrie qui tend au Bois de Roisin ».
Pour respecter cet accord, les bois et les terres en cause sont arpentés, mesurés et cartographiés, à partir du 3 juin 1780, par Thomas Joseph Merlin, architecte et contrôleur des domaines de l’Impératrice, et Pierre Dominique Dutemple, géomètre arpenteur juré français.
Il apparaît lors de la convention signée le 29 septembre 1780 que l’ensemble des bois et terres cédés par l’Autriche représentent en fait 81 bonniers (70 prévus à la convention de 1779 et 11 comprenant le bois du Perchois et quelques parcelles y attenant), soit environ 100 hectares. En contre partie la France cède autant de bonniers, 76 sur La Flamengrie et 5 sur Bettrechies qui reçoit le bois du Perchois.
Si le but que s’était fixé la France au regard de la chaussée Valenciennes-Bavay est atteint, la frontière continue de présenter dans ce petit village un aspect extrêmement sinueux. Pour matérialiser cette nouvelle frontière il est décidé d’installer en 1781 des bornes à chaque changement de direction et comme ce tracé est particulièrement tortueux, il n’en faut pas moins de 65 !
II Leurs situations et leurs représentations
Les bornes 3 à 10 sont en bordure de champ et environ 350 mètres séparent la 3 de la 10
La borne 11 a disparu alors qu’elle était encore présente sur le cadastre de 1912. Les bornes 12, 13 et 14 sont en bordure d’un pré. La 17 et la 18 se trouvent au centre du village, à l’intersection de la rue du Vieux Chemin de Valenciennes et de la rue de l’Église.
La borne 19 qui se trouve sur l’ancienne Chaussée Brunehaut, à l’intersection de la rue du Rivage a été manifestement ciselée.
La borne 20 semble avoir été martelée.
Les bornes 20 , 21, 22 sont très proches les unes des autres, à savoir qu’elles sont espacées d’environ 35 mètres. La borne 23 qui était placée à l’endroit où la frontière fait un angle et la borne 24 située dans la continuité mais en ligne droite ont disparu.
Les bornes 25, 26, 27 sont très rapprochées, distantes d’une quinzaine de mètres. La 27 a été cassée et est donc de petite taille. Les 28 et 29 ne sont plus visibles de nos jours.
La borne 30, située en bout de prairie, près d’une source est très inclinée mais est encore en bon état. La frontière continue ensuite tout droit vers le nord-ouest jusqu’à la borne 33 qui est très endommagée (Absence des bornes 31 et 32)
La borne frontière 36 est en très bon état de conservation.
Les bornes 37, 38 et 39 sont situées dans la même pâture.
La borne 40 est cassée et on y a gravé dessus le chiffre 40.
La borne 44 mériterait d’être restaurée car elle est fendue en deux morceaux.
La borne 45 délimite la frontière entre deux vieilles rangées d’arbres. Pour la 46 voir ci dessus.
La borne 49 située dans le même pré que la 48 a été arrachée et git sur le sol. Il serait judicieux de la redresser afin de la préserver. La borne 50 toujours localisée dans le même pré se trouve en bordure de route.
Cette même route (dénommée Rue Haute) orientée sud-est délimite la frontière où l’on trouve à une cinquantaine de mètres, sur un talus, la borne 51 puis toujours sur cette même rue la borne 52 puis à vint mètres, à l’angle de la rue, la borne 53.
Crédit Photos : Peter Dirven Daniel Gustin