Généralités
Au moment de la conquête du Hainaut par la France, la charge d’intendant prenait une grande importance et devenait la cheville ouvrière du système administratif de la monarchie française. Ces fonctionnaires firent leur apparition durant la première moitié du XVIIème siècle. Ce fut Richelieu qui les créa. Il y avait eu auparavant des maîtres de requêtes que l’on envoyait dans les provinces, au XVIème siècle, pour faire des inspections désignées sous le nom de chevauchées. Mais les fonctions d’intendant, avec leurs attributions régulières, durent vraiment leur existence et leur autorité au grand ministre de Louis XIII, qui en fit un des plus utiles instruments de son administration. Les parlements s’en inquiétèrent, parce qu’ils virent dans ces officiers nouveaux des agents trop efficaces du pouvoir royal et ministériel. Mais ils durent plier sous la main puissante du redoutable cardinal.
Toutefois ils prirent leur revanche après sa mort. Durant la Fronde, le parlement de Paris arracha à la Régence la suppression de ces fonctionnaires. Seules, les intendances du Lyonnais, de la Bourgogne, de la Picardie, du Languedoc, de la Provence et de la Champagne furent maintenues. En 1654, Mazarin, vainqueur des princes et du parlement, rétablit les intendants dans presque toutes les provinces. Lorsque Colbert devint le principal ministre de Louis XIV, en 1662, il augmenta leurs pouvoirs, étendit leur juridiction, et leur assigna une large place dans le régime qu’il organisa si fortement.
Etablis, non sans peine, par Richelieu, malgré le mauvais vouloir des gouverneurs et des parlements, supprimés par la Fronde un moment triomphante, les intendants furent les instruments dévoués de Louis XIV et de Colbert. Ils devaient « connaître de toutes contraventions aux ordonnances et des oppressions que les sujets du roi pourraient souffrir des gens de justice par corruption, négligence, ignorance ou autrement , signaler les procédures oiseuses et les concussions des magistrats, juger par délégation du conseil et rendre, sans appel, des arrêts comportant la peine de mort, prévenir et réprimer tout ce qui pouvait menacer l’ordre, veiller aux approvisionnements et subsistances, à l’état des prisons. Prévenus par les procureurs généraux de tous les abus commis dans la province, suivant au besoin les armées, ils passaient la revue des troupes, pour s’assurer si elles étaient bien équipées, et jugeaient en dernier ressort les gens de guerre. Les routes, les canaux, les mines figuraient parmi leurs attributions, augmentées de tout ce qui concernait l’impôt. Si, sur ce dernier point, leur intervention avait peu d’inconvénients dans les pays d’Etat, grâce aux garanties de leur organisation administrative, il n’en était pas de même dans les pays d’élection où elle pouvait devenir redoutable. Là, en effet, les règlements donnaient à l’intendant le droit de taxer les taillables omis dans les rôles, et d’augmenter arbitrairement les impositions qu’il jugeait trop faibles, faculté funeste qui le rendait maître de la fortune des citoyens et lui permettait d’avantager telle paroisse ou tel fermier, dans l’intérêt de ses protecteurs et de ses amis ». (Pierre Clément, Histoire de Colbert, vol. II, p. 9).
De 1659 à 1678 les intendants siégèrent au Quesnoy, puis à partir de 1678 ils résidèrent à Maubeuge, et ce jusqu’en 1716, année où le siège de l’Intendance de Hainaut fut déplacé à Valenciennes.
Jean Talon (1655-1665)
Résumé :
Intendant d’armée en 1653, intendant du Quesnoy en 1654, puis du Hainaut nouvellement conquis en 1655, de l’Artois en 1661, résidant au Quesnoy, puis de Landrecies, Avesnes, Philippeville et Mariembourg . Il est ensuite choisi pour régler la frontière de la France et de la Flandre. Il est nommé intendant en Nouvelle-France par la commission datée du 23 mars 1665, arrive à Québec en septembre et y reste jusqu’en 1668, puis revient en France comme gouverneur du Roussillon, contrôleur général de l’artillerie. Il retourne en Nouvelle-France en 1670 mais ses infirmités l’obligèrent à revenir en France en 1672. Il est alors nommé secrétaire du Cabinet du roi, puis valet de chambre du roi. Protégé par Madame de Maintenon, Jean Talon vécut dans l’abondance et s’éteint, célibataire, le 24 novembre 1694. Il est inhumé à Châlons-en-Champagne.
Détails concernant sa fonction dans notre région :
Jean Talon est né à Châlons-sur-Marne en janvier 1626. Il fit ses études à Paris, au collège de Clermont dirigé par les Pères de la compagnie de Jésus (1). Cette maison avait été fondée en 1562 (2). En 1595 elle avait été fermée par ordre du Parlement. « Réouverte en 1618 par Louis XIII, et appelée plus tard Louis-le-Grand, elle comptait plus de deux mille élèves, et le pensionnat réunissait tous les beaux noms de France, les fils des plus hauts personnages de la Cour. C’était le pensionnat à la mode. Tout s’y faisait avec luxe ; précepteurs, laquais et domestiques y affluaient au service des jeunes seigneurs » (3), Mgr de Laval fit ses études théologiques au collège de Clermont, vers le même temps que le futur intendant de la Nouvelle-France y étudiait les humanités.
Dans une lettre que Talon écrivit bien des années plus tard, on rencontre le passage suivant : « La première éducation que j’ai reçue par leurs soins obligeants, m’ayant élevé dans les écoles, demande toute ma reconnaissance. Si j’avais conservé le fruit de leurs instructions, j’aurais l’honneur de vous en faire part par un discours latin. Mais je suis devenu méchant écolier de bon maître (4). » Evidemment il ne faut point prendre au pied de la lettre cette expression d’humilité courtoise. Le » méchant écolier » ne laissa pas que de faire excellente figure dans le monde. Une fois ses études terminées, il entra de bonne heure dans la carrière administrative, grâce à ses relations de famille.
Un de ses frères aînés, Philippe, avait embrassé le parti de Mazarin, durant les troubles de la Fronde. En 1649, le cardinal écrivait au duc d’Epernon, commandant d’un corps de troupes : « J’ai songé, depuis ma lettre écrite, à une personne qui est à moi, fort intelligente, pour vous bien servir dans la fonction d’intendant de l’armée, qui est le sieur Talon, qu’on fera partir la semaine où nous allons entrer, et un officier d’artillerie (5). » On voit par la correspondance de Mazarin qu’il confiait à Philippe Talon beaucoup d’affaires et qu’il comptait sur son zèle et ses capacités. Ce fut probablement sous les auspices de son frère que Jean Talon entra dans l’administration militaire vers 1653. Nous lisons le passage suivant dans une lettre de Mazarin à Letellier, datée du 26 novembre de cette année : « Tout présentement vient d’arriver un des Talon, de Sainte- Menehould, pour dire au roi que les gardes sont dans la place et les assiégés dans le château, en exécution de ce qui fut arrêté cet hiver (6). »
Dans une lettre à Turenne, du 21 octobre 1654, le cardinal mentionne » le sieur Talon le jeune. » « Il ne me reste rien à ajouter à ce que le sieur Talon le jeune vous aura dit de ma part… Le roi demeurera encore demain ici et sera après demain à Paris où j’attendrai avec impatience de vos nouvelles. Je vous supplie de m’en donner le plus souvent que vous pourrez et de recommander au sieur Talon d’en prendre soin (7)» C’est donc au milieu des camps et des troupes en campagne que Jean Talon commence sa carrière de fonctionnaire.
Il remplit la charge de commissaire des guerres en Flandre ; il agit comme intendant à l’armée de Turenne, dont l’adversaire n’est autre que le grand Condé, passé au service de l’Espagne. La lutte entre ces deux illustres capitaines est féconde en surprises, en mouvements rapides, en attaques subites, en combats acharnés, en manœuvres savantes, A travers toutes ces péripéties, l’administration militaire a sa large part de labeurs, de responsabilité et de périls, Jean Talon y manifeste des qualités qui le signalent à la faveur de Mazarin.
Après la prise du Quesnoy, petite ville du Hainaut, par Turenne, le 6 septembre 1654, il y est nommé commissaire, A ce moment on commence à l’appeler » M. Talon du Quesnoy « , pour le distinguer de son frère Philippe. Ainsi au sujet de pionniers pour les travaux d’un siège, le cardinal informe Turenne qu’il écrit à M. de Roncherolles et à » M. Talon du Quesnoy. » En 1655 il monte en grade et devient intendant du Hainaut. La correspondance entre lui et le cardinal est très active. Il ne nous semble pas hors de propos d’en donner ici quelques extraits. Au mois de juillet 1656, l’armée royale est forcée de lever le siège de Valenciennes. Talon remplit le désagréable devoir d’en avertir sans retard le ministre. « Quoiqu’il soit fâcheux,» écrit-il, le 16 juillet, à 8 heures du matin, « de donner le premier une mauvaise nouvelle, je ne puis me défendre d’avertir Votre Eminence que le siège est levé… Je l’assure cependant que M. de Turenne est sorti des lignes avec toute son armée. Il sera sorti du quartier de La Ferté de l’artillerie sans armes, pour laquelle il est nécessaire d’avoir des mousquets et des piques. Je donnerai, sur les ordres de M. de Turenne, tout ce que j’ai ici des uns et des autres. Je ne puis donner à Votre Eminence aucun détail, et j’ai bien du chagrin de me sentir obligé de lui dire le gros de l’affaire. »
Le même jour, Mazarin lui répond qu’il connaissait déjà l’échec et n’était nullement découragé. A plusieurs reprises Condé et les Espagnols menacent le Quesnoy, et Talon déploie une grande activité pour fortifier cette place. Mazarin ne lui ménage pas l’expression de sa satisfaction, et le félicite cordialement (8). Plus tard le cardinal dit à Talon combien il lui sait gré de sa diligence à l’avertir de toutes choses. Dans une autre occasion il le remercie du soin qu’il prend des malades et des blessés. Le 2 septembre 16ô6 il lui promet un bénéfice pour un de ses frères, et lui demande s’il serait disposé à acheter une charge de valet de chambre du roi, dont la dernière avait été vendue 68,000 livres. Le 2 mars 1657, le cardinal écrit à Talon que tout ce que l’on pourra dire contre lui ne fera jamais impression sur son esprit. Preuve que si Talon avait des envieux, il jouissait de l’entière confiance du ministre.
L’intendance du Hainaut, dont il avait l’administration, comprenait dix gouvernements ou prévôtés : Valenciennes, Avesnes, Bavay, Charlemont, Landrecies, le Comte, Le Quesnoy, Marienbourg, Maubeuge et Philippeville. A ce moment la charge d’intendant prenait une grande importance et devenait la cheville ouvrière du système administratif de la monarchie française.
Son historien, M. Pierre Clément, a écrit au sujet de ces officiers: « Il est plus facile de montrer à l’œuvre ce représentant, désigné alors sous le nom d’intendant de justice, police et finances, que de préciser ses attributions ».
Talon n’avait que trente ans environ quand il fut investi de cette charge considérable. C’était une preuve manifeste de la confiance qu’il avait su inspirer. Sa juridiction était vaste ; comme nous l’avons vu, elle comprenait le Hainaut français et s’étendait à plusieurs villes de la Flandre. La situation de ce territoire, qui confinait à la frontière des Pays-Bas, faisait de cette intendance d’avant-garde un poste spécialement important. Jean Talon y demeura dix ans, de 1655 à 1665.
Au printemps de cette dernière année, il fut nommé intendant de la Nouvelle-France (9). Un nouveau champ allait s’ouvrir à son intelligente activité. Comme témoignage de haute satisfaction pour les services qu’il avait rendus dans le Hainaut, le roi lui donna, avant son départ, la terre de Locquignol située eu cette province (10). Cet acte de munificence royale montre bien en quelle estime on tenait déjà Talon à la cour et dans les conseils du souverain.
Concernant Locquignol, en décembre 1704, dans une lettre adressée à l’intendant De Bernières qui résidait à Maubeuge, Fénelon, archevêque de Cambrai de 1695 à 1715, demanda qu’il y demeure à un prêtre à portion congrue : « Nous avons, Mr, au milieu de la foret de Mormal, un gros hameau nommé le Locquignols qui est loin de la paroisse nommée Jolimet. Les habitans de ce lieu ne sont occupés que du bois ; ils vivent sans instruction comme des sauvages (…) il y a chez eux une chapelle que feu Mr Talon avait pris soin de mettre en état et ou il tenait aux depens du Roy un prestre résident pour leur instruction et pour leur admnistrer les sacrements » (A.D.N., 1 H/948). Le souhait de Fénelon fut exaucé et la paroisse de Locquignol fut créée.
1 — Les Jésuites et la Nouvelle- France au XVIIème siècle, par le Père de Rochemonteix, vol. III, p. 83.
2 — Histoire de la Compagnie de Jésus, par Crétineau-Joly, Paris, 1845, vol. I, p. 340.
3 — Les Jésuites et la Nouvelle-France. II, p. 243.
4 — Lettre de Talon au R. P. Oliva, général de la Compagnie de Jésus, du 10 novembre 1666, citée par le Père de Rochemonteix, Les Jésuites et la Nouvelle- France, III, p. 85
5 — Lettres de Mazarin, publiées par M. Chéruel, dans la collection des » Documents inédits sur l’histoire de France, » vol. III, p. 426.
6 — Lettres de Mazarin, vol. VI, p. 93
7 — Lettres de Mazarin, VI, p. 362.
8 — Lettres de Mazarin, 2 juillet, 24 juillet, 16 octobre 1655, vol. VII, pp. 543, 556, 582.
9 — Son successeur dans l’intendance du Hainaut fut M. Camus des Touches. Charlevoix annonce en deux lignes la nomination de Talon au poste d’intendant de la Nouvelle- France : » Sa Majesté choisit pour prendre la place de M. Robert, M. Talon, qui était intendant du Hainaut. »
10 — Supplément au rapport sur les archives canadiennes, 1899, par Edouard Richard, p. 40.
Jacques Camus des Touches (1665-1667)
Jacques Camus des Touches
seigneur des Touches
Intendant du Hainaut (1665-1667)
Intendant des contributions pour les fortifications de Charleroi, commissaire général des Suisses, directeur de l’Hôtel royal des Invalides en 1670, contrôleur général de l’artillerie en France en 1673
Né le 19 septembre 1626 à Saint Étienne du Mont (Paris)
Décédé le 10 septembre 1679 en la paroisse Saint-Séverin (Paris) à l’âge de 52 ans
Parents
Jacques Camus, seigneur d’Ollainville et d’Egly. Avocat au Grand Conseil, contrôleur général de l’artillerie. et de Marie du Monceau
Marié le 5 juillet 1661 avec Marie Josèphe Pépin †/1713
dont
Joseph 1662-1713
Louis 1667-1726
Michel 1671-1731
Marie-Charlotte 1672-1698
Seigneur des Touches, frère de Germain-Michel Camus de Beaulieu (1635-1704), intendant d’armée en Franche-Comté en 1674 puis intendant d’armée en Catalogne en 1675-1676, et de Charles Camus du Clos (1636-1696).
Les trois frères sont nommés en 1670, directeurs de l’Hôtel royal des Invalides sous les ordres de Louvois.
Neveux de Jean-Pierre Camus commissaire ordonnateur au département de la Guerre
En 1668 Camus des Touches est intendant en Flandre (Archives Départementales du Nord 4 G 879 Lettres)
Étienne Carlier (1668-1670)
Intendant d’armée en Hollande en 1665, il devient en 1668 intendant du Hainaut : Les Archives Départementales du Nord dans la série 4 G 879 conservent des lettres des intendants en Hainaut Tervuel (1668) et Carlier (1669).
Il est ensuite intendant du Roussillon (1670-1676). Dès 1673, celui-ci se fait admonester par Louvois à cause de son épouse, personnage peu ordinaire qui sème la discorde entre les représentants du roi. En 1675, Louis XIV décide de faire passer une armée à l’offensive en Catalogne. Au mois de mars 1675, Louvois informe Camus de Beaulieu que le roi l’a choisi comme intendant dans l’armée de Catalogne. Carlier, qui a accumulé les reproches, n’est donc plus intendant de l’armée. Au mois de janvier 1676, il se voit retirer les fonctions d’intendant du Roussillon, au profit de Beaulieu. Il meurt quelques jours après. (Louvois et le Roussillon par Alain Ayats Histoire, économie & société 1999)
Louis Damoresan (1670-1678)
Né le le 28 février 1628 Dammartin-en-Goëlle, Seine et Marne. Marié le 28 septembre 1654 Paris avec Françoise Collot. Décédé en 1700
Résumé :
Commissaire des guerres en Catalogne en 1656, commissaire ordinaire des
guerres. Après le traité des Pyrénées, Turenne l’envoie le 6 mars 1660 à Avesnes pour recevoir la place le 15 mars, l’artillerie, les magasins et les munitions qui y sont, en faire tous les reçus et décharges nécessaires et y établir la garnison. Conseiller du roi en ses Conseils,
intendant en Hainaut et pays d’entre Sambre et Meuse en 1670, il est un des signataires du traité signé au Château de Freÿr sur Meuse du 25 octobre 1675 pour le rétablissement du commerce entre la France et les Pays-Bas espagnols.
Détails historiques :
Louis Damoresan, intendant en Hainaut, est anobli le 15 janvier 1675 au titre de son intendance (Courcelles, dict universel de la noblesse 1° série 1820 p 10). Son acte d’anoblissement précise qu’il avait 20 ans de services comme Commissaire des Guerres. Il est le sr d’Amorezan qui apparaît en 1676 dans les correspondances militaires pour la campagne en Hainaut.
En 1659 il est cité dans un avis pour les mineurs Collot, dans l’affaire du procès fait par le surintendant des Postes, Hierosme Mouneau, en remboursement de sommes prétendument dues par le sr Collot… « noble homme Louis Damorezan, Cons du Roi, commissaire ordinaire de ses guerres ».
Dans une correspondance de Louvois à Saint-Mars (beau-frère de Damorezan) du 14 février 1667, le sr d’Amorezan avait quitté son poste à la forteresse de Pignerol depuis deux ans (Joseph Delort : Histoire de la détention des philosophes et des gens de lettres, volume 1 Paris Firmin Didot 1829, p140).
Ses lettres d’anoblissement, analysées par M. Pingault indiquent : « directeur des Finances, vivres, et fortifications de Pignerol et des troupes en garnison aud. lieu et dans les vallées, et pays en dependans depuis 1661 jusqu’en 1664 ».
Il est le signataire pour la France du traité signé au Château de Freÿr sur Meuse du 25 octobre 1675 pour le rétablissement du commerce entre la France et les Pays-Bas espagnols. « Louis Damoresan Conseiller du Roi en ses Conseils, Intendant de Haynault & païs d’entre Sambre et Meuse » (Traité de Freyr)
Un ordre du 18 juin 1668 en faveur du sr d’Amorezan, commissaire des guerres, dit que les majors doivent faire porter l’ordre aux commissaires par un sergent. Repris dans l’ordonnance du 1/8/1733 Chennevières « Détails militaires » TI Paris 1750 p 134.
Dans sa notice sur le bibliophile du Fresnoy, le baron Pichon l’appelle Pierre mais dit que Pierre fut l’intendant au Quesnoy (pour l’approvisionnement des troupes) alors que c’est Louis qui apparaît dans les listes comme intendant en Hainaut.
Joachim Faultrier (1678-1688)
Joachim Faultrier est le fils d’un procureur de l’élection d’Auxerre, où il naquit en 1626. Il est avocat au Parlement de Paris, abbé de Saint-Loup de Troyes et de Notre-Dame d’Ardaine près de Caen. Ayant été remarqué par Louis XIV qui le signale à Louvois, il devint secrétaire général de l’Artillerie et intendant d’armée. Il est envoyé pour participer à des discussions diplomatiques délicates, puis devient en 1678 intendant de la province de Hainaut, province frontière du royaume dépendant du secrétaire d’État de la Guerre. Il abandonne sa charge en 1688 et se retire dans un logement à l’Arsenal que le roi lui concéda. L’abbé Faultrier consacra le reste de son existence de sa vie aux belles-lettres. Bibliophile, il a constitué une précieuse bibliothèque, dont le catalogue a été dressé par Prosper Marchand (1678-1756).
Henri Caffiaux, dans son Essai sur le régime économique, financier et industriel du Hainaut après son incorporation à la France (Valenciennes, 1873, p. 255) le décrit comme un homme « dévoué au roi jusqu’à l’abnégation de soi-même », qui s’efforçait de conserver intacts les droits régaliens tout en soutenant avec ardeur ceux du peuple « dont il eût voulu être le père ».
La présence française fut longtemps acceptée à contrecœur : « La résistance passive, pour reprendre l’expression de Jean Mossay, un historien d’Avesnes, dura un demi-siècle ». Le clergé semble avoir joué un rôle prépondérant dans l’exacerbation des sentiments anti-français de la population ; l’intendant Faultrier rapporte qu’en 1683, « les prédicateurs prêchent contre les Français, comme l’on prêchait pour la croisade contre les Sarrazins, et il n’y a insolence dont ils ne remplissent leurs sermons. Le nom du roi même y est souvent répété. On m’a dit qu’il y a un livre qui circule et qui a pour titre : Rex christianus Turco-Gallus. Je l’ai fait chercher, mais on ne le trouve pas. Cependant il n’y a pas un paysan qui ne sache par cœur toutes les extravagances qu’ils entendent débiter dans les églises, dans les rues et dans les cabarets » (Arch de la Guerre A1-688 , f° 249) .
Bibliographie : Moreri, t. 5, p. 51 ; Hoefer, t. 17, col. 177 ; Caffiaux (Henri), Essai sur le régime économique, financier et industriel du Hainaut après son incorporation à la France, Valenciennes : Lemaître, 1873, XXIV-487 p., p. 249-260 ; Mossay (Jean), Les intendants du Hainaut à Maubeuge, 1678-1720 (Mémoires de la Société archéologique et historique de l’arrondissement d’Avesnes, t. 23), 1971, 424 p., p. 23 et suiv. ; Hasquin (Hervé), L’intendance du Hainaut en 1697 : édition critique du mémoire rédigé « pour l’instruction du duc de Bourgogne », Paris : Bibliothèque nationale, 1975, 147 p., p. 27 et 117-121
Daniel-François Voysin de La Noiraye
(1688-1698)
fils de Jean-Baptiste Voysin de La Noiraye (1620-1672), intendant à Rouen en 1664, intendant à Tours (1655-1672), conseiller au parlement de Paris en 1674, maître des requêtes en 1683, intendant d’armée à Tournai en 1682, intendant du Hainaut en 1688 jusqu’en 1698.
Daniel-François Voysin était né à Paris en 1654, d’une famille de magistrats. A vingt ans, il fut admis comme conseiller au Parlement de Paris. Sa carrière fut brillante, rapide, étonnante. Il la dut, non pas tant à ses talents et à son travail qui faisaient de lui un auxiliaire précieux pour le Roi, qu’à l’influence de sa femme. Il épousa en effet en 1683 Charlotte Trudaine, fille d’un conseiller à la Chambre des Comptes ; et c’est en faveur de ce mariage qu’il obtint, parait-il, la place de maitre des requêtes et, en 1688, l’intendance du Hainaut. Un grand travailleur au demeurant qui accomplissait lui-même dans les plus menus détails sa besogne écrasante d’Intendant.
Dès 1694, il est nommé conseiller d’État de senestre et on lui confie l’intendance de la maison d’éducation pour jeunes filles de Saint-Cyr que Madame de Maintenon avait fondée. Il en devient le directeur en 1701. En 1709 il est nommé ministre d’État et secrétaire d’État de la Guerre. Il est ensuite chancelier de France, garde des Sceaux, du 2 juillet 1714 au 2 février 1717 et ministre de la Guerre du 9 juin 1709 au 14 septembre 1715 dans le Gouvernement Louis XIV.
Dans le Hainaut Voysin dénonça la situation fiscale de la région et dans son Mémoire de 1698 il mentionne que les habitants d’Avesnes sont enfermés entre des bureaux de douane et ne peuvent sortir avec des marchandises , en quelque endroit qu’ils aillent, sans payer de droits élevés. L’intendant prit d’ailleurs souvent le parti des habitants brimés par les agents du fisc et leur fit rendre justice.
Parlant en 1698 des Hennuyers de France, l’intendant Voysin écrivait : « Les habitans y sont laborieux et ne se rebutent point du travail ; il n’en faut pas d’autre preuve que la persévérance qu’ils ont dans le temps de guerre à cultiver et ensemencer leurs terres quoy qu’ils ayent une certitude presque entière qu’ils n’en feront pas la récolte ».
Concernant la forêt de Mormal, convoitée entre Français et Espagnols, l’intendant Voysin écrivait en 1697 : « Le roy possède auprès du Quesnoy la forest de Mormall. Elle contient 17.563 arpens de bois plain ; les arbres y viennent fort beaux. Il y a les trois quarts de hestre et un quart de chesne ; le fond est un peu humide, ce qui fait que la qualité du bois n’est pas fort bonne pour employer à des bâtimens ; presque tout se consomme en bois à brûler qui se débite du costé du Cambrésis où il n’y en a point. L’on en coupe tous les ans 150 arpens et la vente monte toujours environ à 80.000 florins. Dans le milieu de la forest, il y a un petit château apelé Locquignol qui est du domaine du roy avec quelques terres et prairies qui peuvent valoir 3.000 l. par an.
Le roy a etably une jurisdiction au Quesnoy pour avoir l’administration et veiller à la conservation de cette forest. Elle est composée d’un maître particulier sous le grand-maître des Eaues et forests de Flandre et Hainaut, un lieutenant particulier de la maîtrise, un procureur du roy et un garde marteau. » ( Becourt, Histoire de la forêt de Mormal, Lille, 1887)
Lors de ses fonctions en Hainaut, il eut à gérer des actes de sabotages. L’un de ceux qui eut le plus de retentissement fut la tentative de destruction de l’arsenal d’Avesnes en 1690. Une dénonciation parvenue à Paris indiquait qu’un bourgeois d’Avesnes, nommé Brissé, était chargé d’exécuter cet attentat pour le compte des Espagnols. Brissé avait en effet un frère qui dirigeait à Charleroi les partis ennemies qui venaient dévaster la province. Brissé, qui était tonnelier, devait pénétrer dans le magasin pour y réparer des tonneaux en poudre. Il devait d’ailleurs y être introduit par un complice, qui n’était autre que le garde chasse du comte de Broglie (lettre de Louvois au comte de Broglie 25 juin 1690 Arch Guerre A1-956,f° 320). Le garde chasse avait pour mission de dissimuler sous une peau de lièvre un « feu d’artifice » et de déposer l’engin parmi le tonneaux. les deux complices auraient reçu de fortes sommes pour perpétrer leur exploit. Mais le Roi, avertit à temps, fit arrêter Brissé et son complice, et une information fut ouverte. A vrai dire, l’intendant Voysin, qui en fut chargé, ne parvint pas à faire la lumière sur le complot (Lettres de Voysin à Louvois du 10 juillet 1690 Arch Guerre A1-950,f° 71). Aussi, après avoir conservé quelque temps les prévenus en prison, il se borna à les bannir du royaume. Mais l’affaire fit grand bruit. Louvois rappela sévèrement à l’intendant qu’il fallait expulser du territoire français tous ceux, sans exception, qui avaient des membres de leur famille au service de l’étranger (Histoire de la ville d’Avesnes J Mossay 1956).
Charles-Étienne Maignart de Bernières
(1698-1705)
Charles-Etienne Maignard, marquis de Bernières, était né le 1er août 1667. Comme Voysin, son prédécesseur, il appartenait à une vieille famine de magistrats. Son père, Etienne Maignard, avait été conseiller au Parlement de Paris, puis premier président au Parlement de Rouen. La famille était originaire de la Normandie, et elle avait pris le nom d’un fief qu’elle y possédait : la terre de Bernières. Sa noblesse était assez ancienne, puisqu’elle remontait à un certain Richard Maignard, gouverneur de Vernon, qui remit cette ville en 1442 sous l’obéissance du roi Charles VII . Ses armes étaient d’azur, à la bande d’argent, chargée de trois quintefeuilles de gueules. Charles-Etienne avait suivi la carrière paternelle. A 23 ans, il était conseiller au Grand Conseil. A 27, il était fait maitre des requêtes. A 31, il était chargé de l’Intendance du Hainaut. C’était un avancement rapide et le Roi lui témoignait une particulier estime en le nommant si jeune à un poste aussi difficile. L’emploi nécessitait d’autant plus de sang-froid, d’expérience et d’esprit de décision que Voysin laissait, en s’en allant en 1698, une province ruinée, épuisée et affamée. Le courant était rude à remonter et les nouvelles guerres en perspective comme l’appauvrissement général de la France, devaient rendre la tache d’un Intendant singulièrement compliquée. Bernières s’y employa pourtant avec bonheur. Autant Voysin avait été dur, sec, intraitable, autant celui-ci se montrait conciliant et diplomate. II réussit non seulement à préparer les guerres et à nourrir la population, ce qui n’était pas un mince problème, mais encore à mener à des dispositions plus pacifiques des habitants qui n’avaient pas encore admis la conquête française.
Charles-Étienne Maignard, (ci-dessus) est chevalier, seigneur et marquis de Bernières, la Rivière-Bourdet et autres lieux. Il est qualifié de haut et puissant seigneur dans plusieurs actes. Source : Les Maignart de Bernières
Licencié en droit le 9 septembre 1688, conseiller au Grand Conseil le 5 août 1690, maître des requêtes le 11 septembre 1694, il est nommé intendant du Hainaut le 18 août 1698. Au début de 1702, il devient en plus intendant aux armées de Flandre et d’Allemagne, le 9 septembre 1705 il est nommé à Ypres. Le 9 juin 1708 il est nommé intendant de Flandre. Il réunit en 1716 la généralité de Lille (Flandre Wallonne) à celle de Dunkerque (Flandre Maritime) sous le nom de département de Flandre, on en détache Valenciennes pour en faire la capitale du Hainaut français à la place de Maubeuge. Il meurt en poste.
Nicolas-Étienne Roujault (1705-1708)
Nicolas Roujault est membre d’une famille de bourgeoisie parisienne connue depuis le XVIe siècle, anoblie par charge de secrétaire du roi en 1607. Il devient avocat du roi au Châtelet en 1686. Il achète cette charge 60 000 livres en décembre 1685 à Louis Le Peletier, le fils du contrôleur général des finances Claude Le Peletier. Il devient conseiller au Parlement de Paris en 1689 et maître des requêtes le 29 janvier 1696. Il mène ensuite une carrière d’intendant en Berry (1699-1705), puis en Hainaut (1705-1708).
Jean-Charles Doujat (1708-1720)
Jean-Charles Doujat (1653 1726) appartenait à une famille toulousaine qui a produit de nombreux juris-consultes à partir de Louis Doujat, avocat au Grand Conseil en 1515. Jean-Charles était fils de Jean Doujat (1620 – 18 janvier 1710), conseiller au Parlement de Paris le 30 août 1647 et doyen de celui-ci à partir de 1694 (Bois-LISLE, t. II, p. 104 n.).
Chevalier, fut successivement conseiller au Grand Conseil, maitre des requêtes, intendant de Bordeaux (1701), intendant de Poitou le 8 juin 1705 (Mercure galant, juin 1705, pp. 231 sq. — Dangeau, t. X, p. 343 — Sourches, t. IX, p. 268). Il permuta le 7 juin 1708 avec Nicolas Etienne Roujault, intendant de Maubeuge, les appointements de cette charge étant augmentés en sa faveur de 8000 francs (Mercure galant, juillet 1708, Ire p., p. 127 — Dangeau, t. XII, p. 155). Il resta à Maubeuge jusqu’au 15 janvier 1720, date à laquelle il fut nommé à l’intendance de Moulins (Dangeau, t. XVIII, p. 207). Voir sur lui J. MOSSAY, pp. 281-409 — Bulletin de la Commission historique du département du Nord, t. V, 1857, p. 55, n. 2 — La Chesnaye-Desbois, t. VII.
René Louis de Voyer de Paulmy d'Argenson
(1720-1724)
Fils aîné du lieutenant général de police Marc René, 1er marquis d’Argenson (1652-1721) et de Marguerite Le Fèvre de Caumartin, il fait des études de droit et devient très jeune intendant du Hainaut (1720-1724) puis conseiller d’État. Il ne porte cependant guère d’intérêt à ces responsabilités administratives, à la différence de son frère cadet, le comte d’Argenson.
Félix Aubery de Vastan (1724-1727)
Félix Aubery, marquis de Vastan, baron de Vieux-Pont… D’abord avocat du roi au Châtelet, il fut ensuite conseiller au Parlement (1716) ; maître des requêtes (1718) ; intendant de Limoges (1723), de Maubeuge (1725), de Caen (1727), de Châlons (1730) ; conseiller d’État (1743). Il mourut le 20 juillet de cette dernière année, étant en fonctions.
Jean Moreau de Séchelles (1727-1743)
Maître des requêtes le 13 octobre 1719, intendant du Hainaut à Valenciennes de 1727 à 1743, puis intendant de Lille de 1743 à 1754, il est parallèlement intendant des Flandres de mai 1745 au 18 octobre 1748, pendant l’occupation française.
Jean-Baptiste de Machault d'Arnouville
(1743-1745)
Jean-Baptiste de Machault, comte d’Arnouville, seigneur de Garge et de Gonesse, fut intendant de la province de Hainaut à Valenciennes (1743), puis contrôleur général des finances de Louis XV (1745-1754), puis secrétaire d’État de la Marine (1754) et garde des sceaux de France (1750) jusqu’à sa disgrâce en 1757 à l’instigation de Madame de Pompadour. Il vécut dès lors éloigné de la Cour jusque sous la Révolution française : âgé de quatre-vingt-douze ans, il fut arrêté à Rouen et emprisonné en 1794 à la prison des Madelonnettes où il mourut peu de temps après.
Il fut nommé intendant de la Province de Hainaut à Valenciennes le 1er mars 1743, sur la recommandation du comte d’Argenson. Il était lié avec le procureur général Guillaume-François Joly de Fleury et ami intime de Daniel-Charles Trudaine.
Louis XV eut l’occasion de faire la connaissance de Machault d’Arnouville lorsqu’il logeat à l’intendance de Valenciennes en 1744 et 1745.
Jacques Pineau (1745-1752)
Jacques Pineau de Lucé (1709-1764), maître des requêtes, intendant de Tours (1743-1745) puis de Hainaut (1745-1752), et enfin d’Alsace (1752-1764). Il avait remplacé le 30 décembre 1745 Machault d’Arnouville, par lettre de commission. Lucé rendait compte de ses actes en matière militaire au comte d’Argenson, secrétaire d’État de la Guerre. Dans le cadre de ses fonctions, l’intendant était en effet l’interface entre les officiers supérieurs et généraux à l’armée, les habitants dont il avait la tutelle, et le secrétaire d’État de la Guerre à Versailles auquel il rendait des comptes.
François-Marie Peirenc de Moras
(1753-1755)
D’une famille originaire des Cévennes, François Marie Peyrenc de Moras est le fils d’un financier Abraham Peyrenc de Moras (1686-1732), lui-même fils de chirurgien-barbier enrichi dans le système de Law, et d’Anne-Marie-Josèphe de Fargès (1699-1738), fille de munitionnaire. Leur noblesse est toute récente, elle date de 1720. Il épouse Marie-Jeanne-Catherine Moreau de Séchelles, après contrat passé devant notaire, le 13 juin 1739, fille de Jean Moreau de Séchelles qui fut en poste à Valenciennes comme intendant du Hainaut de 1727 à 1743.
Il entame sa carrière dans la charge de conseiller au Parlement de Paris dès le 21 juin 1737. Il acquiert celle de maître des requêtes le 17 août 1742. Le 4 juin 1745, il est nommé lieutenant des chasses de la capitainerie de Livry et Bondy. En 1750, il entame, à l’âge de 32 ans, la tournée des intendances, à Riom en Auvergne, puis deux ans plus tard dans le Hainaut à Valenciennes.
Sa nomination comme intendant du Hainaut est pour lui une promotion car le Hainaut est un lieu stratégique au rôle militaire important face aux possessions autrichiennes, ce qui le place directement sous l’autorité du secrétaire d’État de la guerre. En 1755, il quitte le Hainaut pour devenir intendant des finances auprès de son beau-père, contrôleur général des finances depuis 1754.
Louis-Guillaume de Blair (1755-1765)
Louis Guillaume de Blair de Boisemont, seigneur de Boisemont, Courdimanche et Cerna, maître des requêtes, qui, de l’Intendance de La Rochelle, passa à celle du Hainaut de décembre 1754 à novembre 1764 et de celle-ci à celle de Strasbourg. Il se maria le 29 avril 1755 avec Jacqueline de Flesselles, sœur de Jacques de Flesselles, conseiller au Parlement de Paris, puis maître des requêtes, et fille de Jacques de Flesselles, seigneur de Champgueffier en Brie et de la Chapelle-Iger, et d’Elisabeth ROBINET, d’Auxerre.
Jacqueline de Flesselles par son mariage apporte en avancement d’hoirie 350 000 livres payables 180 000 livres la veille des épousailles et 170 000 livres constituées en un contrat de 8 500 livres de rente annuelle et perpétuelle, payables de six mois en six mois.
De son côté, Louis-Guillaume de Blair apporte en propre la terre et seigneurie de Boisemont dans le bailliage de Meulan, celle de Courdimanche dans la prévôté et élection de Pontoise, un droit de quarante sous sur chaque bateau de sel passant sous le pont de Mantes, 680 livres de rente sur des particuliers ou loyers de maisons à Mantes, l’Office de maître des Requêtes et son mobilier d’une valeur de 60 000 livres. Il doit sa fortune au marquis d’Argenson qui lui a fait donner la ferme des aides du duc d’Orléans, puis l’a fait nommer à la tête de la Compagnie des vivres. Il est bon administrateur, ce qui lui vaut d’être nommé intendant
Louis Gabriel Taboureau des Réaux
(1765-1775)
Il est né à Paris le 20 octobre 1718, issu d’une famille bourgeoise de Touraine, anoblie en 1713. Il est maître des requêtes, puis intendant général du Hainaut et Cambrésis du 11 novembre 1764 à 1775. Il est ensuite nommé contrôleur général des finances du 21 octobre 1776 au 29 juin 1777. Il sera alors remplacé par Necker avec le titre de directeur général des finances. Il fut nommé au Conseil royal des finances le lendemain de sa démission (30 juin 1777). Il mourut en 1782 sans postérité.
On doit à l’intendant Taboureau des Réaux la substantielle documentation constituée non seulement par les relevés annuels de naissances, mariages et décès demandés par le contrôleur général des finances Terray, mais aussi par la mention du nombre d’hommes et de femmes vivant dans chaque ville ou communauté villageoise. L’entreprise était à ce point remarquable que Turgot lui-même ne dédaigna pas de prendre la plume le 9 février 1775 pour remercier Taboureau des soins qu’il avait pris « en étendant le dénombrement à tous les lieux de son département ». ADN, C 9156.
Gabriel Sénac de Meilhan (1775-1790)
Résumé :
Second fils de Jean-Baptiste Sénac, premier médecin du roi depuis 1752 — et, à ce titre, anobli — et de Marie-Thérèse Tanet, d’une famille de marchands de Gironde, il suit à partir de 1756 des études de droit et correspond avec Voltaire, qui lui écrit, le 4 juillet : « Faites de la prose ou des vers, Monsieur, donnez-vous à la philosophie ou aux affaires, vous réussirez à tout ce que vous entreprendrez. »
Avocat au Parlement de Paris en 1762, il obtient une charge de conseiller au Grand Conseil, émanation du Conseil du Roi, et entame une brillante carrière administrative, grâce à de solides appuis à la cour, notamment de Choiseul, dont il fréquente la sœur, la comtesse de Tess.
Il achète une charge de maître des requêtes au conseil d’État en 1763 et devient successivement intendant de la Guadeloupe en 1763 – où il ne se rend pas –, des îles de France (Maurice) et de Bourbon (La Réunion) en 1764, La Rochelle en 1766, Provence en 1773, Valenciennes, puis brièvement intendant de la guerre et des armées auprès du comte de Saint-Germain en 1775. En juin 1790, il émigre et séjourne à Londres, puis Aix-la-Chapelle et Rome. Un temps évoqué comme ambassadeur à Venise, il obtient finalement de Catherine II l’autorisation de se rendre à la cour de Russie. En 1792, il compose une Défense de Louis XVI. Invité au château de Rheinsberg par le prince Henri de Prusse, frère cadet de Frédéric II, il entreprend la rédaction du roman L’Émigré. Il est également accueilli par le duc de Brunswick. En 1801, son fils cadet, resté en France, tente de le faire rayer de la liste des émigrés. Il est autorisé à s’installer chez son fils, place Vendôme. Le 7 janvier 1802, son fils cadet meurt, à l’âge de 31 ans ; Sénac retourne à Vienne. Alexandre Ier rétablit sa pension, qui avait été annulée par Paul Ier, mais il meurt à Vienne. Source du texte : forum Marie Antoinette
Données en tant qu’intendant du Hainaut :
Il affine le travail de son prédécesseur concernant l’établissement des chiffres de la population. Il propose de croiser les relevés en les sollicitant de deux origines différentes. Si les comptages des actes consignés dans les registres de catholicité sont donnés par les curés, il est utile d’en demander de nouveaux aux greffiers des bailliages où sont déposés les registres, « si, note Sénac, en revanche les premiers chiffres viennent des greffiers, il faudrait avoir recours aux curés ». (ADN, C 626, population, généralité de Valenciennes, 1783-1784). La confrontation de deux états a t-elle été mise en œuvre ? probablement pas de façon de façon systématique tant la tâche pour les services administratifs de l’intendance eut été considérable. Il eut cependant des contrôles mis en œuvre sans délai à l’instigation de l’intendant Sénac de Meilhan car les autorités tenaient en suspicion les curés soupçonnés de négligence dans l’exercice de leurs fonctions en n’inscrivant pas sur les registres tous les décès d’enfant mourant en bas âge. L’intendant écrivit dans un mémoire intitulé « observations sur l’état de la population de la généralité de Valenciennes pour l’année 1784 » : On s’est assuré au surplus qu’il n’y a point eu de négligence de la part des curés à porter sur les registres les décès des enfants en bas âge (ADN, C 626).
La personnalité de Sénac de Meilhan, politologue et sociologue au service de la monarchie administrative au temps de Louis XVI est décrite par l’historien moderne Philippe Guignet, au travers de son action comme intendant de la généralité de Valenciennes. A partir des études qui lui ont été consacrées, l’auteur dresse un portrait nuancé de cet intellectuel en politique, qui fut l’homme du Roi, à l’écoute de sa province, mais plein de réserve à l’égard de la création des Etats de Hainaut en 1788, car il percevait le péril pour l’ordre monarchique, de ce transfert de prérogatives opéré au nom du libéralisme aristocratique.(Persée : Lottin (Alain), Crepin (Annie) et Guislin (Jean Marc). Intendants et préfets dans le Nord-Pas-de-Calais. (XVIIe-XXe siècle).[compte-rendu]